Quebec commentaries on the Elghawaby Islamophobia appointment
2023/02/01 Leave a comment
Le Devoir had three commentaries on the appointment, highlighting how this appointment and her comments on Bill 21 and anti-Muslim sentiment have resulted in a “cue the outrage” response, even if her comments were in line with what other commentators and public figures have and continue to state.
Some go beyond the Quebec aspect in highlighting her tweet on Joseph Heath’s critique of the American term BIPOC in favour of FIVM (Francophone, Indigenous and Visible minorities) which reflects the Canadian reality better (Elghawaby stated “I’m going to puke“).
Interestingly, there has also been some pushback by members of the Iranian Canadian community, partly driven by their visceral reaction to the hijab, given that the Iranian regime forced it on women and the recent protests against the mandatory hijab and regime. Kaveh Shirooz has been active on twitter pointing out that Elghawaby has argued that “People who are angry with the government in Iran are taking it out on Canadian citizens that are Muslims here,” rather than criticizing the Iranian regime for its repression (Google search does not show any other commentary on the Iran protests unless I missed it).
I suspect that her appointment may be more divisive within the Canadian Muslim community than might first meet the eye, between the more secular and more religious.
Will be interesting to see whether these reactions continue or fade out:
Kaveh Shahrooz کاوه شهروز @kshahrooz4d
.@HonAhmedHussen: in 2021, I told the CBC that we need to distinguish between anti-Muslim hatred [obviously bad] and opposition to Islam as an ideology [which is everyone’s right]. This was Ms. @AmiraElghawaby‘s reply. Will she make that distinction in her new role? twitter.com/HonAhmedHussen…
.@HonAhmedHussen I note that as people were (and continue to be) slaughtered in Iran for the right to live free of religion, this was Ms. @AmiraElghawaby ‘s contribution. I’ve been close the protests in the diaspora: to suggest that targetting Muslims represents anything but the absolute most minor fringe in these protests is absolutely dishonest. And yet that’s what Ms. Elghawaby chose to focus on. This was a poor choice, Minister.
Lisée: “I want to puke”
Elle m’a eu au mot « vomir ». En anglais, puke. Je parle d’Amira Elghawaby, la nouvelle conseillère spéciale de Justin Trudeau en matière d’islamophobie et d’antiracisme. C’était il y a huit mois. Le Globe and Mail avait mis sur son fil Twitter le texte d’opinion d’un professeur de philosophie de l’Université de Toronto, Joseph Heath, affirmant que les concepts utilisés par les militants antiracistes canadiens, importés des États-Unis, ne pouvaient s’appliquer correctement à l’histoire canadienne du racisme.
Mme Elghawaby a commenté le tweet, choisissant et retranscrivant spécifiquement le passage qui suit : « Enfin, il convient de noter que le plus grand groupe de personnes dans ce pays qui ont été victimes du colonialisme britannique, subjugué et incorporé à la confédération par la force, sont les Canadiens français. » Au-dessus de cette citation, la militante a écrit : « I’m going to puke » (« Je vais vomir »).
Croyez-moi, j’ai tenté de trouver une autre explication. Mais la seule qui s’impose est la suivante. Mme Elghawaby était à ce point outrée que quelqu’un rappelle qu’en nombre, sinon en intensité, les francophones ont été les plus grandes victimes du colonialisme que sa réaction ne fut ni de contre-argumenter, ni d’affirmer Lison désaccord, ni d’ignorer simplement ce point de vue. Non. Elle a souhaité que tous ses abonnés sachent que la seule évocation de l’importance de l’oppression vécue par les Canadiens français lui causait une violente réaction, physique — au sens propre, « viscérale » — de rejet.
Justin Trudeau, qui était fier de présenter sa nouvelle recrue dimanche à la commémoration de l’horrible tuerie de la mosquée de Québec il y a six ans, a déclaré qu’elle était la personne choisie pour « bâtir des ponts avec les Québécois et les autres Canadiens ». Si c’est vrai, on aimerait avoir la liste de ceux qui n’ont pas été retenus. Don Cherry ? Amir Attaran ?
Pablo Rodriguez qui est, comme l’a dit récemment M. Trudeau au sujet d’un autre de ses ministres, un « bon Québécois », s’est déclaré « profondément insulté et profondément blessé » par un autre propos formulé par écrit par Mme Elghawaby. En effet, dans un texte, toujours en ligne, dans l’Ottawa Citizen, cosigné par l’ex-président de la section ontarienne du Congrès juif canadien Bernie Farber et s’opposant à la loi 21, on lit : « Malheureusement, la majorité des Québécois semblent influencés non pas par la primauté du droit, mais par des opinions négatives envers l’islam. Un sondage réalisé par Léger Marketing plus tôt cette année a révélé que 88 % des Québécois qui avaient des opinions négatives sur l’islam appuyaient l’interdiction. » (Je dois avouer que j’ai moi-même des opinions négatives envers le christianisme, l’islam et toutes les autres religions.)
Cela voulait-il dire que Mme Elghawaby estimait que les Québécois sont islamophobes, selon le mot désormais accepté à Ottawa et qui signifie à la fois sentiment anti-musulman et toute critique de l’islam, quelle qu’elle soit ? Mais non ! Qu’allez-vous chercher là ? Sur son fil Twitter, la dame nous a rassurés vendredi dernier : « Je ne crois pas que les Québécois sont islamophobes ; mes commentaires passés faisaient référence à un sondage au sujet de la loi 21. » Affirme-t-elle maintenant que ce sondage était fautif ? A-t-elle de nouvelles données ?
Si elle s’est trompée dans ce texte, elle a récidivé dans un autre, de 2020, du Toronto Star. Après avoir cité un membre de la communauté musulmane de Québec, Rachid Rafah, affirmant qu’« au Québec, les gens ne peuvent pas admettre qu’il y a des problèmes dans cette société. Je ne sais pas pourquoi ». Elle ajoute : « Il n’y a pas que la plupart des Québécois qui sont dans le déni », trop de Canadiens le sont aussi.
Si on prend le temps de lire ses écrits un peu plus vieux, on ne peut que déceler une constante dans son appréciation des Québécois, superbement étalée dans ce texte de 2013 du Star sur la charte des valeurs. Elle cite d’abord le livre A Fair Country, de John Ralston Saul : « Dans tout le monde occidental dans la seconde moitié du XIXe siècle, les civilisations de la classe moyenne, enchaînées et obsédées par l’empire ont progressivement glissé vers les peurs paranoïaques du XXe siècle. Peur de quoi ? Peur de la perte de pureté — sang pur, pure race, purs traits nationaux et valeurs et liens. »
Son commentaire : « Il aurait pu écrire cela au sujet du Québec d’aujourd’hui. Les sondages favorables à la charte indiquent que [Pauline] Marois a puisé dans une paranoïa viscérale de l’autre qui hante parfois les communautés avec un effet tragique. » Elle se désole ensuite que certains se résignent à ce que « la province ne changera jamais, restant un bastion forcé et statique de la culture et de l’identité françaises ; un rêve partagé qui nie le rôle et la présence des Premières Nations au départ, et celles des minorités qui sont venues plus tard ? ».
Plus près de nous, son texte de l’Ottawa Citizen recèle une autre pépite. Elle y donne un avis bien senti, spécifiquement sur François Legault : « Le premier ministre de la province continue de nier l’existence de l’islamophobie, y compris les expériences des Québécoises qui disent avoir ressenti un racisme croissant au cours des derniers mois. Les politiciens qui flattent les tendances xénophobes doivent être appelés sur le tapis. » Bang !
Avis à ceux qui assisteront à leur première rencontre : apportez vos sacs à vomir.
Source: «I want to puke»
Dutrisac: Des excuses? «No thanks.»
Il faut croire que c’est en toute connaissance de cause que Justin Trudeau a nommé la militante Amira Elghawaby à titre de « première représentante spéciale du Canada chargée de la lutte contre l’islamophobie ». Même s’il avait su ce qu’elle avait écrit, il l’aurait nommée quand même, a-t-il soutenu.
Interprétant de façon abusive un sondage sur l’attitude des Québécois à l’égard de l’islam, Amira Elghawaby a écrit en 2019 que « la majorité des Québécois semblaient influencés non pas par la primauté du droit, mais par un sentiment antimusulman ». Il est difficile de savoir ce qui est pire : que les Québécois s’opposent à la règle de droit ou qu’ils soient antimusulmans. On peut constater que la représentante spéciale, pur produit de l’idéologie multiculturaliste canadienne, a pris quelques libertés avec les faits. Le communiqué du premier ministre la décrit d’ailleurs comme une journaliste primée et une militante, comme s’il n’y avait pas là contradiction dans les termes.
Un passage d’une chronique publiée dans The Globe and Mail par le professeur de philosophie Joseph Heath, de l’Université de Toronto, lui a donné envie « de vomir », avait-elle écrit spontanément sur Twitter en 2021. Un passage où l’universitaire faisait observer que le plus grand groupe de personnes qui furent victimes du colonialisme britannique au Canada, c’étaient les Canadiens français.
La thèse de Joseph Heath est pourtant intéressante. Il relève qu’au Canada anglais, on utilise l’acronyme américain BIPOC (Black, Indigenous and people of color), qui ne correspond à la réalité canadienne des relations raciales. Aux États-Unis, les Noirs représentent la minorité raciale la plus importante, et de loin, que ce soit en nombre ou en raison de son poids historique. Dans l’énumération, les Autochtones, qui représentent 5 % de la population canadienne, devraient venir avant les Noirs, qui sont trois fois moins nombreux, et les francophones avant les Autochtones en raison de leur nombre. Donc, au lieu de l’acronyme américain BIPOC, le professeur Heath propose l’acronyme FIVM (pour Francophone, Indigenous and visible minority) pour désigner les plus importants groupes minoritaires au Canada. Il souligne que contrairement aux États-Unis, où on analyse les conflits sociaux à travers « une lentille raciale », le Canada n’a pas cherché à « racialiser » les différences ethniques entre ses citoyens. L’idée qu’un immigrant débarquant au Canada en provenance d’Éthiopie a vraiment quelque chose en commun avec un descendant d’esclaves africains présents sur le continent depuis 300 ans est « non seulement une fiction : c’est une fausse représentation pernicieuse ».
Il faut croire que l’influence américaine est forte puisque, dans le communiqué du premier ministre, la description de tâches de cette nouvelle représentante spéciale amalgame la religion — la lutte contre l’islamophobie — au racisme systémique et à la discrimination raciale.
Certains voudraient qu’Amira Elghawaby s’excuse — c’est le cas du chef parlementaire du Parti libéral du Québec, Marc Tanguay — ou retire ses propos. Mais ce ne serait là que parfaite hypocrisie. La représentante spéciale du Canada incarne un courant de pensée fort répandu au Canada anglais, où l’on est viscéralement contre la conception québécoise de la laïcité et de l’équilibre recherché entre différents droits qui, dans une société, peuvent entrer en conflit.
Au débat des chefs en anglais, lors de la dernière campagne électorale fédérale, la question posée au chef du Bloc québécois, Yves-François Blanchet, dont la prémisse était que « le Québec a un problème de racisme » parce que le gouvernement caquiste a fait adopter la loi 21 sur la laïcité et la loi 96 sur la langue témoignait de ce consensus au Canada.
On peut être en désaccord avec des aspects de la Loi sur la laïcité de l’État — c’est la position du Devoir, d’ailleurs —, mais ce n’est pas une loi xénophobe ni antidémocratique. Comme le soulignait le juge Robert M. Mainville dans une décision partagée de la Cour d’appel du Québec sur une requête interlocutoire demandant la suspension de la loi 21 (présentée par l’ancien employeur d’Amira Elghawaby, le National Council of Canadian Muslims), « la conception de la symbolique religieuse et sa place dans l’espace public ne sont d’ailleurs pas perçues de façon identique par chaque société, la Loi sur la laïcité de l’État en est un exemple frappant au sein du Canada ». Et encore : « On peut constater que la question de l’égalité des sexes en regard du foulard islamique ne se prête pas à des réponses simples ou évidentes. »
Justin Trudeau a dit que la nouvelle représentante resterait en poste. Soit. Mais puisqu’elle crache (ou vomit) sur la société québécoise, que, manifestement, elle méconnaît, qu’elle reste chez elle. Le phénomène de l’islamophobie au Canada anglais devrait amplement l’occuper.
Source: Des excuses? «No thanks.»
David: L’huile sur le feu
Il serait absurde de nier que l’islamophobie, tout comme le racisme, existe au Québec, au même titre qu’ailleurs au Canada et un peu partout sur la planète. Le premier ministre Legault convient lui-même que nous ne sommes pas à l’abri de ces maux, même s’il réfute leur caractère systémique.
Cela dit, non seulement le raccourci pris par Amira Elghawaby pour affirmer que « la majorité des Québécois » est animée par un sentiment anti-musulman était insultant, mais il témoignait au surplus d’une malhonnêteté intellectuelle qui ne plaide pas en faveur de la nouvelle représentante spéciale du gouvernement Trudeau dans la lutte contre l’islamophobie.
S’il était vrai, comme l’indiquait un sondage Léger, que 88 % des islamophobes appuyaient la Loi sur la laïcité de l’État (loi 21), on ne pouvait pas inverser la proposition et affirmer que la majorité des partisans de la loi étaient islamophobes. Mme Elghawaby a parfaitement le droit de ne pas aimer la loi 21 et de la combattre, mais cela ne l’autorise pas à faire un procès d’intention aussi gratuit qu’injuste à ceux qui la soutiennent.
Même si on voulait lui donner le bénéfice du doute en invoquant un manque de disposition pour les mathématiques, elle a tenu dans le passé d’autres propos qui laissent peu de doute sur les sentiments qu’elle éprouve envers le Québec.
Le député péquiste des Îles-de-la-Madeleine, Joël Arseneau, s’est montré passablement indulgent en parlant d’une « incompréhension » de la société québécoise. Cela ressemble davantage à une détestation. Même le ministre fédéral du Patrimoine, Pablo Rodriguez, s’est dit « blessé et choqué comme Québécois ». C’est dire.
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On ne peut pas s’opposer à la vertu. Toute mesure visant à lutter contre l’islamophobie et à faciliter l’intégration des musulmans à la société canadienne est assurément la bienvenue.
La question est de savoir pourquoi Justin Trudeau a choisi une militante « pure et dure » comme Mme Elghawaby pour occuper un emploi qui va exiger beaucoup de doigté pour favoriser les rapprochements, au Québec comme dans le reste du pays. Lancer des anathèmes n’est assurément pas la meilleure façon d’y parvenir.
Les « clarifications » qu’elle a apportées n’ont pas satisfait le gouvernement Legault, qui exige son départ, mais M. Trudeau est tout disposé à s’en contenter. D’ailleurs, il l’aurait nommée de toute façon, a-t-il reconnu. S’il a pu être agacé par la maladresse de sa recrue, le fond de ses déclarations ne l’a manifestement pas troublé.
Le premier ministre et Mme Elghawaby partagent la même aversion pour la loi 21. Dans l’exercice de ses nouvelles fonctions, elle persistera sans doute à dire tout le mal qu’elle en pense, avec la bénédiction de son patron. M. Trudeau aurait voulu jeter de l’huile sur le feu qu’il n’aurait pas pu faire un meilleur choix.
Toute attaque contre la loi 21 provoque maintenant une réaction épidermique chez M. Legault, comme on l’a vu encore dernièrement quand son homologue canadien a réitéré son intention de la contester et de limiter l’utilisation préventive de la disposition de dérogation.
Dimanche, il brillait par son absence lors de la commémoration du massacre de la grande mosquée de Québec. Il n’avait sans doute pas très envie d’entendre les porte-parole du Centre culturel islamique lui reprocher une loi qui « vient chambarder tout ce qu’on fait comme travail pour le vivre-ensemble ».
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L’indignation provoquée par la nomination de Mme Elghawaby rappelle celle qui avait accueilli, en janvier 2021, la nomination de la géographe Bochra Manaï au poste de commissaire à la lutte et à la discrimination systémiques à la Ville de Montréal, Mme Manaï ayant été précédemment porte-parole du Conseil national des musulmans canadiens.
M. Legault avait aussi qualifié cette nomination d’« erreur » en raison de la « croisade personnelle » de Mme Manaï contre la loi 21 qui, selon elle, avait fait du Québec « une référence pour les suprémacistes extrémistes ».
Le chef du Parti québécois, Paul St-Pierre Plamondon, avait déploré que la mairesse Plante utilise des fonds publics pour « imposer son idéologie » et prédit que la nouvelle commissaire allait semer la division. Manifestement, ses propos étaient insultants. Depuis deux ans, on n’a cependant entendu personne se plaindre de son travail.
Il est sans doute de bon ton de réclamer le départ de Mme Elghawaby, mais il est clair que M. Trudeau ne reviendra pas sur sa décision. Dès lors, la meilleure attitude à adopter est peut-être celle du chef du Bloc québécois, Yves-François Blanchet, qui a réclamé une rencontre avec la représentante spéciale.
Sans se faire trop d’illusion sur son acte de contrition, le chef du Bloc se dit prêt à entendre de plus amples explications. Qui sait, lui-même pourra peut-être lui expliquer certaines choses qu’elle ignore sur le Québec. Il sera toujours temps de déchirer sa chemise si elle ne veut toujours pas comprendre.
Source: L’huile sur le feu