Lisée: Le droit au monologue

A noter:

Ce n’est pas tous les jours que 388 professeurs, auteurs et personnalités se donnent la peine de signer une lettre commune, publiée mardi dans Le Devoir (« Ce ne sont pas que des mots »), pour nous avertir de « dérapages inquiétants, de plus en plus nombreux » dans le débat public au Québec.

M’étant plusieurs fois exprimé, y compris dans ces pages, sur la nécessité d’un débat qui, s’il peut être robuste, doit toujours être respectueux, j’ai été étonné que ma signature n’ait pas été sollicitée. J’ai compris pourquoi une fois avoir soigneusement examiné de quoi il était question.

Les signataires nous y aident en donnant, au total, quatre exemples de ce qui leur paraît intolérable. Il s’agit d’abord d’une entrevue donnée à Stéphan Bureau par Léa Clermont-Dion. Elle y décrit son groupe social d’origine à Rawdon comme étant du « White trash ». Une expression dure, rarement utilisée au Québec, mais courante aux États-Unis pour désigner une population blanche marginale, peu éduquée. Bureau lui demande si elle oserait aussi parler de « Black trash ». « Ben non, ça marcherait pas », dit-elle.

L’échange a été capté par un chroniqueur de Québecor, Mathieu Bock-Côté (MBC), qui y a vu un exemple de « racisme anti-blanc ». (Détail savoureux : ce sont les esclaves noirs du sud des États-Unis qui ont inventé le terme pour dénigrer ces Blancs). L’argument du deux poids, deux mesures se tient, mais la charge de MBC est un peu lourde, d’autant que Clermont-Dion s’amende, dans l’entretien, d’avoir utilisé le terme. Puis, le reproche lui en a été fait sur les réseaux sociaux. J’y reviens.

Les signataires renvoient ensuite à un gazouillis où une autrice et éditrice écrivait ceci : « Les élections et leurs hochets habituels — et même certains dont nous croyions qu’ils appartenaient à un vieux Québec ranci et révolu : l’immigration, l’identité, le vilain étranger, les maudits intellectuels ». Je ne la nomme pas parce que les signataires s’insurgent que de tels propos entraînent une riposte ad hominem, mais surtout parce qu’elle a retiré la publication. Le gazouillis serait passé inaperçu si MBC n’avait pas jugé dans son blogue qu’il « est difficile de trouver un propos plus méprisant à l’endroit des centaines de milliers de Québécois qui prennent la question identitaire au sérieux ».

Pour moi, c’est clair : les deux positions ont droit de cité dans notre débat public. L’autrice a le droit de penser et d’écrire que ces thèmes reflètent un « Québec ranci et révolu », d’autres ont droit de répliquer que cette opinion suinte le mépris.

Le troisième cas concerne l’auteur et vice-président de la Ligue des droits et libertés, Philippe Néméh-Nombré. Dans Seize temps noirs pour apprendre à dire kuei, (Mémoire d’encrier), il écrit : « Une autopatrouille qui brûle est une promesse. » Ce qui lui vaut, toujours par MBC, une accusation de glorifier la violence antipolicière. Cette phrase est prise « hors contexte », écrivent les signataires. Je suis allé le lire. J’ai bien trouvé cet autre extrait : « Détruire des ordinateurs, fracasser des vitrines, brûler des autopatrouilles, bloquer des ponts, des voies ferroviaires. » Mais je n’ai trouvé aucun contexte qui puisse laisser entendre que ces phrases ne doivent pas être prises au premier degré. Il s’agit, au mieux, d’une normalisation de la violence, au pire, de sa glorification. Que les signataires estiment que cela devrait passer comme une lettre à la poste laisse songeur.

Finalement, la lettre nous emmène en 2018, dans la foulée de l’attentat à la mosquée de Québec. Dans un texte publié dans La Presse, la prof et psychiatre Marie-Eve Cotton estime troublant que certains se montrent empathiques envers les troubles psychiatriques de l’accusé, Alexandre Bissonnette, mais n’en fasse pas autant envers les tueurs islamistes qui ne sont, écrit-elle, « pas moins désespérés, apeurés, perdus, et habités d’une colère qui cherche un objet sur lequel se déverser ». Cette fois, c’est Richard Martineau qui monte au créneau, estimant qu’il faut distinguer « un massacre perpétré par une personne déséquilibrée et dépressive et un attentat sanguinaire commis au nom d’une cause par un terroriste qui revendique fièrement son geste ». Ici encore, les deux positions doivent avoir droit de cité. (Je trouve pour ma part des parcelles de vérité dans les deux textes.)

Les signataires se plaignent que la force de la riposte est disproportionnée, de deux façons. D’abord, parce que des chroniqueurs et animateurs ont des tribunes dont l’empreinte est très large; ensuite, parce que leurs critiques entraînent sur la Toile un flot de commentaires souvent haineux qui traumatise l’auteur du texte critiqué. Personne n’est préparé pour le torrent de réactions qu’une première déclaration tranchée peut provoquer. Mais tous ceux qui mettent le petit orteil dans le débat public doivent savoir que cette tempête permanente existe. Il n’y a que deux façons d’y survivre : pour les menaces, on appelle le 911, pour toute violence verbale, on bloque jusqu’à ce que la racaille disparaisse de nos fils.

Mais la lettre ouverte appelle les propriétaires de médias à mettre leurs chroniqueurs et animateurs en laisse. Ils devraient s’abstenir de relever qu’untel parle d’un « Québec ranci » et que tel autre sourit à la vue d’une autopatrouille en flamme. Au nom de quoi, exactement ? Du droit de ne pas être contredit ? Du droit au monologue ?

Je remarque, dans la liste des « victimes » citées et les signatures, des gens qui, à répétition, ont écrit que ceux qui n’étaient pas de leur avis sur la question de la laïcité étaient, nécessairement, des opportunistes et des racistes. On comprend que, du haut de leur certitude d’être les seuls porteurs de la raison, ils voudraient que leur intolérance et leur irrespect de l’autre ne soient relevés par personne, ou alors qu’on taise leurs noms dans les répliques, même lorsqu’ils persistent et signent dans l’insulte.

L’argument de la disproportion des voix aurait de la valeur si l’espace médiatique québécois n’était pas si diversifié. Toute personne outrée peut publier sa prose sur son blogue ou ses réseaux avec l’appui et le relais de sa communauté de vues. Des lettres ouvertes sont acceptées dans tous les médias. J’admets qu’il manque de signatures et de tribunes, disons, « woke », à Québecor, mais ce n’est pas le cas dans ce quotidien-ci, ni à La Presse ni à Radio-Canada.

On pourrait débattre, chiffres à l’appui, de la présence médiatique relative des deux grandes tendances intellectuelles qui s’affrontent. Il faut cependant savoir qu’en politique comme dans le débat d’idées, chacun est toujours convaincu que l’autre camp a trop de visibilité.

J’ai jugé particulièrement significatif de constater que le signataire principal de cette lettre, Mathieu Marion, dénonçant le manque de retenue et de respect et les attaques ad hominem, un prof de l’UQAM, a affirmé quelques jours auparavant sur Twitter que la pensée de MBC s’apparentait à de la « pink slime » — cette viande artificielle dont la vue lève le cœur. Ce qui me rappelle vaguement une histoire de paille et de poutre.

Source: Le droit au monologue

Lisée: «Nègres blancs d’Amérique» 55 ans après

Lisée on the history and the context of when the book was written, and its questionable relevance today in terms of current challenges:

L’auteur était le plus souvent debout. En l’absence de chaise ou de table, il écrivait penché sur le lit superposé du haut. Il n’avait pas de stylo, c’était interdit. Il usait ses bouts de crayon à mine, sans rien avoir pour les aiguiser. En haut de chaque page subtilisée à la cantine, il écrivait, en anglais, « Notes for my lawyer », seule façon d’avoir le droit de mettre quoi que ce soit sur papier. Il ne savait pas d’où venait sa soudaine fluidité d’écriture. D’autant qu’il sortait d’une grève de la faim d’un mois qui lui avait soustrait 25 kilos. Il pouvait écrire de jour comme de nuit, l’ampoule ne s’éteignait jamais.

« La fatigue provenait moins de la faim que du bruit infernal qui régnait dans la prison, a-t-il raconté. À toute heure du jour, il se trouvait des détenus pour taper à corps perdu sur les murs métalliques des cellules ou pour improviser des rythmes assourdissants de tam-tam. D’autres hurlaient jusqu’à épuisement leur terreur ou leur désespoir. D’autres encore s’ouvraient les veines et déclenchaient par leur acte un tumulte ahurissant. Un Noir mit le feu à ses vêtements et chercha ainsi à s’immoler. Un autre se jeta tête première du deuxième étage de notre section. Un troisième fut battu à mort par les surveillants dans sa cellule. »

C’est ainsi qu’est né l’essai québécois le plus lu au monde. Celui qui fit scandale, lors de sa publication il y a 55 ans. Celui dont le titre seul, aujourd’hui, peut mettre fin à des carrières journalistiques ou universitaires, scandaliser le CRTC, pousser une commission scolaire anglophone de Montréal à apposer un autocollant pour cacher le mot offensant dans chaque exemplaire d’un manuel.

Pierre Vallières et son camarade Charles Gagnon occupaient cette cellule de la prison des hommes de New York, surnommée The Tombs, Le sépulcre, en septembre 1966, pour avoir « troublé la paix » en manifestant devant l’édifice de l’ONU en faveur de l’indépendance du Québec. Les deux prisonniers sont surtout accusés d’avoir organisé, plus tôt cette année-là à Montréal, des attentats du Front de libération du Québec.

Vallières noircit donc les pages « avec la fébrilité de celui qui sait qu’il peut être déporté à tout instant et qui profite de chaque minute de libre expression qu’il lui reste encore ». Il pond donc en deux mois 90 % d’une oeuvre qui fera 540 pages chez l’imprimeur. Les deux tiers des feuillets sont déjà sortis de la prison lorsque l’extradition vers Montréal se produit.

Paniqué à l’idée que le dernier tiers sera saisi par des policiers québécois, qui eux lisent le français, Vallières offre un troc aux agents américains de l’immigration venus le saisir au sortir de sa prison : il ne résistera pas physiquement à cette nouvelle arrestation si les agents remettent les pages restantes à son avocat. Si ces agents n’avaient pas tenu parole, rapporte Vallières, le livre n’existerait pas. L’auteur est absent du lancement, le 14 mars 1968, car emprisonné et en procès pour les attentats qui lui sont attribués.

Vallières tenait à son titre, mais l’idée n’était pas neuve. Comme le rappelle Daniel Samson-Legault dans sa méticuleuse biographie de Vallières, Le dissident, chez Québec Amérique (que je recommande chaudement), l’expression avait été utilisée avant lui par Marie-Victorin, les journalistes Jean Paré, Yves Michaud et quelques autres pour décrire la condition des Canadiens français.

Vallières la reprend à répétition dans l’ouvrage et s’en sert comme d’un synonyme d’« opprimé ». Il l’associe d’ailleurs à toutes les victimes du capital, y compris aux ouvriers blancs américains. « C’est en anglais que ce concept se formula spontanément dans ma tête. White Niggers of America. Les Noirs américains furent les premiers, et pour cause, à saisir ce que pouvait être, sur les rives du Saint-Laurent, la condition particulière des Québécois francophones. »

Il ne dit pas à quels Noirs il fait référence, mais on sait que le leader noir américain de l’époque, Stokely Carmichael, qui viendra à Montréal, n’a rien à redire sur cette appropriation sémantique. De même, après avoir trouvé le titre très drôle, Aimé Césaire, inventeur du concept de « négritude », dira que Vallières avait bien compris qu’il ne s’agissait pas que de couleur de peau. Vallières use avec autant de liberté du terme « esclavage », une condition qu’il dit retrouver chez tous les dépossédés. On est dans l’hyperbole, pas dans la nuance.

Le livre fait fureur. Environ 50 000 exemplaires vendus au Québec, presque autant aux États-Unis, sans compter les versions allemande, espagnole et italienne. Brusquement, en 1969, l’auteur, l’éditeur — le poète et futur ministre péquiste Gérald Godin pour la maison Parti pris — et même la dactylo sont accusés d’avoir, en publiant l’ouvrage, fait oeuvre de sédition. Un crime passible de 14 ans d’emprisonnement.

Le ministre de la Justice de l’Union nationale, Rémi Paul, fait saisir tous les exemplaires en circulation, y compris celui du dépôt légal à la Bibliothèque nationale du Québec. L’accusation n’aura pas de suite. Le livre reprendra sa carrière en 1972, une fois passée la crise d’Octobre (pendant laquelle les felquistes le font lire à leur otage britannique, James Cross).

Faut-il le relire aujourd’hui ? Seulement si on veut prendre la mesure de la dépossession dans laquelle étaient plongés les Québécois du début des années 1960. Vallières décrit le délabrement et l’insalubrité de son quartier, Jacques-Cartier, sur la Rive-Sud (en forçant le trait, nuance son biographe, mais même…). Le récit biographique du jeune révolté reste poignant, celui de sa recherche intellectuelle, entre Teilhard de Chardin, Sartre, Marx et le Che, est fastidieux, mais ne manque pas de sincérité. Son appel à la violence révolutionnaire, au moment du formidable essor du Québec social, syndical, laïque, culturel et politique de 1966, était, même à l’époque, une erreur et un leurre.

Le problème n’est pas que Nègres blancs d’Amérique ait mal vieilli. Il fait simplement partie de l’histoire. Il est dans notre rétroviseur. Il a peu — rien ? — à nous dire sur le Québec d’aujourd’hui ou de demain. Son titre, seul, résonne comme un cri de liberté, comme l’audace de dire des choses avec des mots forts, en les détournant ou en leur faisant violence. Un doigt d’honneur aux censeurs d’hier et d’aujourd’hui.

Source: «Nègres blancs d’Amérique» 55 ans après

Lisée: Le nouvel Ancien Testament

Nice satyrical take on replacing words in existing literature:

Transportons-nous dans les locaux de la Commission de réécriture intersectionnelle des manuscrits et propos offensants et fautifs. La CRIMPOF. Sur le grand tableau recensant les travaux accomplis, on constate que beaucoup de textes pour enfants ont déjà traversé la moulinette à n’offenser personne. Les livres du Dr Seuss, d’Enid Blyton (Le club des cinq) et de Roald Dahl (Charlie et la chocolaterie) sont déjà réglés. Au rayon des adultes, les James Bond ont aussi connu un premier toilettage. Peut-être faudra-t-il y revenir, car dans aucun des 14 ouvrages d’Ian Fleming son héros n’a de partenaire gai, ni même fluide.

L’équipe de zélés censeurs a beaucoup de mérite. L’ampleur de la tâche est telle que d’autres baisseraient les bras. Mais ils sont rappelés à l’importance de leur labeur par cette maxime, mise en évidence sur le mur, du grand auteur anglais George Orwell : « Tous les documents ont été détruits ou falsifiés, tous les livres réécrits, tous les tableaux repeints. Toutes les statues, les rues, les édifices, ont changé de nom, toutes les dates ont été modifiées. Et le processus continue tous les jours, à chaque minute. » C’est dans son roman phare 1984. Des ignares y voyaient un avertissement contre l’oppression intellectuelle. Les salariés de la CRIMPOF savent qu’il s’agit au contraire d’un énoncé de mission.

L’édifice est vaste comme un salon du livre, avec des sections par région, sujet, âge. La déchiqueteuse est fortement sollicitée au rayon « Allemagne, Deuxième Guerre mondiale ». Les jeunes Allemands se sont dits profondément choqués qu’on leur remette constamment sur le nez l’action des nazis, alors qu’ils n’y sont pour rien. Désormais, fini le chagrin causé par ces rappels traumatisants.

Aujourd’hui s’engage un débat important dans la section consacrée aux textes dits sacrés. Que faut-il faire de la Bible, de la Torah, du Coran ? Trois des ouvrages les plus lus au monde. Davantage que les Harry Potter. C’est dire.

Chacun vient faire rapport au commissaire en chef.

— Ça commence mal, dit l’un. Dieu crée l’homme à son image, puis la femme à partir d’une simple côtelette, pour le désennuyer.

— La femme, un produit dérivé ? Ça n’a pas de sens, opine le commissaire. Il faut réécrire. Et les autres genres, ils arrivent quand ?

— Ça empeste l’hétéronormativité, enchaîne le lecteur chargé du Déluge. Dieu dit à Noé et à sa femme d’embarquer un mâle et une femelle de chaque espèce dans son arche.

— Vous savez quoi faire, dit le commissaire. Mais que se passe-t-il avec ceux restés à terre ?

— Euh, c’est que… Dieu les noie.

— Tous ?

— Oui, tout le reste de la population mondiale. C’est comme qui dirait le plus grand crime contre l’humanité de l’histoire.

— Bon, reprenez-moi tout ça, mon petit. Écrivez que Noé et ses polyamoureux partent en croisière, tout simplement.

— Dans la Torah, dit un autre, il y a ce passage où les deux filles de Lot saoulent leur père et couchent avec lui pour tomber enceintes. Ça ne fait pas un peu culture du viol à l’envers ?

— Oui, et on me signale deux viols dans la Bible. Gommez-moi tout ça. Au moins, avec la libération des esclaves hébreux de l’Égypte, on tient un bon filon, non ?

— Ça commence bien, en effet, répond le responsable, mais une fois qu’ils sont sortis d’Égypte, Dieu les implore de trucider beaucoup de monde : « quiconque ne chercherait pas l’Éternel, le Dieu d’Israël, devait être mis à mort, petit ou grand, homme ou femme ». On est en plein nettoyage ethnique, là !

— Coupez, coupez. De toute façon, c’est trop long.

— Parlant de violence, patron, moi, je suis sur le Coran et j’ai repéré quelques passages assez, disons, tranchants.

— Une dizaine ? Enlevez-les !

— Pas une dizaine, 164.

— Moi, dans la Bible, enchaîne un autre, j’en ai 842 !

— C’est inadmissible, dit le commissaire. Mais pour le Coran, c’est une religion minoritaire. Vous connaissez notre devise. Il ne faut pas seulement accepter la différence, il faut aimer la différence.

— Certes, répond le chargé du texte, mais, dans les pays musulmans, ils sont majoritaires. Alors, ne doivent-ils pas, eux, aimer la différence ?

— Absolument, tranche le commissaire. C’est pourquoi nous avons dépêché des délégations de la CRIMPOF à Kaboul, à Téhéran et à Riyad. D’ailleurs, quelle nouvelle ?

— Ils sont en prison, monsieur le commissaire.

— Pour quel motif ?

— Inimitié envers Dieu.

(Silence gêné)

— Bon, reprend le commissaire en se tournant vers un autre lecteur. Au moins, avec vous, qui travaillez sur le Nouveau Testament, on est dans l’amour du prochain.

— Oui, ça se présente plutôt bien, surtout qu’on peut suggérer que Jésus a le béguin à la fois pour Marie Madeleine et pour Jean. On est dans la fluidité.

— Super, rien à retoucher, donc.

— Il y a quand même le moment où Jésus est très agressif avec des commerçants. Il renverse leurs étals !

— Écrivez qu’il était mécontent et qu’il a poliment laissé une note dans la boîte à suggestions.

— Puis il y a la crucifixion, c’est très gore. Des clous, un glaive, des épines. Ça traumatise beaucoup de monde.

— Vous avez raison. Mais l’intrigue nécessite qu’il soit puni, sinon il n’y a pas de suspense. Que pourrions-nous mettre ?

— J’ai une idée, dit l’un ! Trente jours de travaux communautaires ?

— Parfait, conclut le commissaire. On a bien travaillé.

— J’ai quand même un doute, dit en hésitant un des relecteurs jusqu’ici muet.

— On a laissé des passages offensants, demande le commissaire ?

— Non. Je me demande si on n’est pas en train d’appauvrir de façon irréversible le patrimoine de l’humanité.

— Je suis extrêmement offensé par ce que vous venez de dire, rétorque le chef. Vous êtes superviolent.

Puis :

— Gardes ! Emmenez ce jeune offensant. Et crucifiez-le !

Source: Le nouvel Ancien Testament

Lisée: And what if Quebecers are less racist than other Canadians?

Lisée contrasting Quebec and RoC polling data and providing context for Quebec policies on immigration, multiculturalism/interculturalisme and language. Polling data with regional breakdowns between Montreal and the regions would likely nuance his assertions, nor fully explain the high levels of support for Bills 21 and 96 or the general level of political discourse on these issues, but they certainly play a part.

Lisée may have overstepped his case with respect to the number of visible minorities elected in the 2022 election, 12 elected members by my count, 9.6 percent, not 12 percent, largely reflecting the concentration in and around Montreal (just as the GTA bumps up Ontario provincial and federal MP representation numbers:

The number is nine. That’s the percentage of Quebecers who believe some races are superior to others. They, along with other Canadians, were asked this straightforward question by Angus Reid in 2021: “In all honesty, do you think that all races are equal in terms of their natural characteristics, or do you think that some races are naturally superior to others?”

Nine per cent may seem high, but compare it to Ontario, Saskatchewan and Manitoba with a rate of 14 per cent. There is a spike of 19 per cent in PEI (this may be a sampling error) and lows of 11 per cent in Alberta and eight per cent in Newfoundland and Labrador.

Interestingly, one finds that 13 per cent of Indigenous people believe in the inequality of races and 18 per cent of non-Caucasian/non-Indigenous – double the Quebec number.

How can we possibly square this result with the mere existence of Quebec’s secularism law, known as Bill 21, and the apparent consensus outside Quebec that citizens there are closed-minded? The answer, as Justin Trudeau explained the other day, is Quebecers relation to religion, especially with the misogynistic aspects of the Catholic religion of yesteryear and, these days, Islam.

https://e.infogram.com/lisee-racisme-fig-2-en-1h8n6m31ngx0j4x?live?parent_url=https%3A%2F%2Fpolicyoptions.irpp.org%2Fmagazines%2Ffebruary-2023%2Fquebec-racism%2F&src=embed#async_embed

That is why this same Angus Reid poll found what every other poll will tell you: a much bigger slice of Quebec opinion has negative views of religions as a whole and of Islam in particular. Angus Reid reports that whereas 25 per cent of all Canadians feel “cold” towards Muslims, the chill reaches 37 per cent in Quebec. Still in minority territory (63 per cent feel warm towards them) but a significant difference.

Since support for the secularism bill, which bans the wearing of all religious signs for civil servants in authority, hovers around 65 per cent, there are simply not enough Quebecers who dislike Muslims to account for that great a number. Clearly, other variables are at play and racism is not one of them.

In fact, Canadian pollsters regularly find Quebecers more tolerant on a range of issues than other Canadians. Ekos found in 2019 that 30 per cent of Quebecers believed there were too many members of visible minorities among immigrants. That is awful. But this level rose to 46 per cent in Ontario and 56 per cent in Alberta. And among visible minorities, 43 per cent felt there were too many visible minorities among immigrants. In short, Quebecers were less intolerant of racialized immigrants than Canadians as a whole and citizens of color themselves.

https://e.infogram.com/lisee-racisme-fig-3-en-1h7k2305xlekg2x?live?parent_url=https%3A%2F%2Fpolicyoptions.irpp.org%2Fmagazines%2Ffebruary-2023%2Fquebec-racism%2F&src=embed#async_embed

But these are opinions. What about actions? Hate crimes were more numerous in Ontario than in Quebec per capita in 2019, 2020 and 2021, the year in which there is the latest available data. The Montreal police reports that in 2020 and 2021, the first years of application of the law on secularism, the number of hate crimes related to religion was down 24 per cent. Sure, with the pandemic, there were fewer opportunities to meet and hate each other. Yet they also had a pandemic in Toronto and there, according to the Toronto Police 2021 Hate/Bias Crime Statistical Reportreligious hate crimes increased by 16 per cent over the same period.

How about discrimination in employment? 2021 Statistics Canada data show that immigrants in Quebec have an employment rate greater than workers born in Quebec (at a ratio of 107 per cent) whereas the opposite is true in Ontario (a ratio of 95 per cent). The gap is greatest for women, with a ratio of 102 per cent employment in Quebec versus 91 per cent in Ontario, probably a result of Quebec’s far reaching daycare program. The same is true for members of visible minorities, whose rate of employment is equal to that of the rest of Quebecers, better than the 95 per cent level in Ontario. Simply put, as an immigrant or a BIPOC, your chances of getting a job is higher in Quebec than in Ontario, especially if you are a woman.

The recent October 2022 Quebec election was remarkable for one barely noticed achievement. For the first time, it delivered the same proportion of elected members from visible minorities, (12 per cent) than their share of the electorate and the same rate (20 per cent) of members of non-French and non-English origin. A perfect score. In Ottawa, Parliament still falls short of its goal of representing 25 per cent of visible minorities, having reached only 15.7 per cent.  In Ontario, with 30 per cent of minority population, the recent parliament counts 23 per cent representation.

None of these numbers are new, but I bet you are reading them here for the first time. Why? Simply because they are so counter-intuitive that few people outside Quebec look for them. Or when these numbers are encountered, they are treated as outliers that surely do not represent reality.

Yet going back in time, Quebec has reached achievements on race significantly before others on the continent. For example, the August 1 commemoration of the British Slavery Abolition Act of 1833 is problematic in Quebec because it ignores the fact that slavery had already been abolished there for 30 years. In Upper Canada, MPs had voted in 1793 to abolish slavery but grandfathered the “property” of current slave-owners. Slavery thus persisted until 1820. The British 1833 act compensated slave-owners for the “loss” of their property.

Quebecers had none of that. Open-minded judges started declaring slavery illegal in Quebec as early as 1798, without delay or compensation. It disappeared completely in very short order, as told by Frank Makey in his seminal Done with Slavery: The Black Fact in Montreal, 1760-1840 (McGill-Queen’s Press). “The way in which slavery was abolished in Quebec turned out to be one of the most humane and least constraining,” he writes. Slavery thus ended in Quebec 20 years before its demise in Upper Canada, 30 years ahead of the rest of the Empire and 63 years before the emancipation of Black Americans.

Jews were barred from elected office in the entire British Empire until 1858, except in Quebec. In 1832 the Assembly, with a Patriote majority (the ancestor of both the Quebec Liberal Party and the Parti Québécois) voted an act granting full citizenship to Jews, the Brits be damned.

As for relations with First Nations, in 1701 the Governor of New France and 39 leaders of First Nations gathered in Montreal for the most far-reaching peace treaty ever negotiated between settlers and First Nations in the hemisphere. That’s Nobel Peace Prize territory. In modern times, Quebec signed the first comprehensive land claim in Canada in 1975 and René Lévesque made sure the Quebec National Assembly was the first Parliament in Canada in 1984 to recognize the existence of Indigenous nations on the territory. In 2003 the Paix des Braves with the Cree nation became the gold standard for the granting of autonomy to First Nations.

Environics Institute reports that like other Canadians 44 per cent of Quebecers believe the government has not done enough to ensure true reconciliation. But there are laggards. Those who find that we have gone too far, that we have been too generous. In Quebec, 13 per cent think so. Too many. In Canada: 20 per cent. Too many and a half.

It is also interesting to note how the anti-religious sentiment of Quebecers is intertwined with the issue of residential schools. Polling firm Léger asked who was responsible for this disaster: the federal government or the Catholic Church. Obviously, the answer is: both. But the pollster forced his respondents to choose. Two-thirds of Canadians pointed to the church. Quebecers even more: 69 per cent. The more memory Quebecers have, the more they condemn the church, at 76 per cent among those over 55 years old. Quebecers also say they are more ashamed, at 86 per cent, than the high Canadian average of 80 per cent.

Surely, tons of columns can be – and have been – written on all the faults and frailties of Quebecers. I have written a few myself. Comparative arguments have little weight when the task is to fight back against discrimination, racial profiling, decades-long neglect of Indigenous communities.

They have value, however, when mainstream voices outside Quebec take a moral high ground to misjudge and mischaracterize Quebec, its citizens and its history on issues of race and tolerance.

Source: And what if Quebecers are less racist than other Canadians?

Quebec commentaries on the Elghawaby Islamophobia appointment

Le Devoir had three commentaries on the appointment, highlighting how this appointment and her comments on Bill 21 and anti-Muslim sentiment have resulted in a “cue the outrage” response, even if her comments were in line with what other commentators and public figures have and continue to state.

Some go beyond the Quebec aspect in highlighting her tweet on Joseph Heath’s critique of the American term BIPOC in favour of FIVM (Francophone, Indigenous and Visible minorities) which reflects the Canadian reality better (Elghawaby stated “I’m going to puke“).

Interestingly, there has also been some pushback by members of the Iranian Canadian community, partly driven by their visceral reaction to the hijab, given that the Iranian regime forced it on women and the recent protests against the mandatory hijab and regime. Kaveh Shirooz has been active on twitter pointing out that Elghawaby has argued that “People who are angry with the government in Iran are taking it out on Canadian citizens that are Muslims here,” rather than criticizing the Iranian regime for its repression (Google search does not show any other commentary on the Iran protests unless I missed it).

I suspect that her appointment may be more divisive within the Canadian Muslim community than might first meet the eye, between the more secular and more religious.

Will be interesting to see whether these reactions continue or fade out:

Kaveh Shahrooz کاوه شهروز  @kshahrooz4d

.@HonAhmedHussen: in 2021, I told the CBC that we need to distinguish between anti-Muslim hatred [obviously bad] and opposition to Islam as an ideology [which is everyone’s right]. This was Ms. @AmiraElghawaby‘s reply. Will she make that distinction in her new role? twitter.com/HonAhmedHussen…

.@HonAhmedHussen I note that as people were (and continue to be) slaughtered in Iran for the right to live free of religion, this was Ms. @AmiraElghawaby ‘s contribution. I’ve been close the protests in the diaspora: to suggest that targetting Muslims represents anything but the absolute most minor fringe in these protests is absolutely dishonest. And yet that’s what Ms. Elghawaby chose to focus on. This was a poor choice, Minister.

Lisée: “I want to puke”

Elle m’a eu au mot « vomir ». En anglais, puke. Je parle d’Amira Elghawaby, la nouvelle conseillère spéciale de Justin Trudeau en matière d’islamophobie et d’antiracisme. C’était il y a huit mois. Le Globe and Mail avait mis sur son fil Twitter le texte d’opinion d’un professeur de philosophie de l’Université de Toronto, Joseph Heath, affirmant que les concepts utilisés par les militants antiracistes canadiens, importés des États-Unis, ne pouvaient s’appliquer correctement à l’histoire canadienne du racisme.

Mme Elghawaby a commenté le tweet, choisissant et retranscrivant spécifiquement le passage qui suit : « Enfin, il convient de noter que le plus grand groupe de personnes dans ce pays qui ont été victimes du colonialisme britannique, subjugué et incorporé à la confédération par la force, sont les Canadiens français. » Au-dessus de cette citation, la militante a écrit : « I’m going to puke » (« Je vais vomir »).

Croyez-moi, j’ai tenté de trouver une autre explication. Mais la seule qui s’impose est la suivante. Mme Elghawaby était à ce point outrée que quelqu’un rappelle qu’en nombre, sinon en intensité, les francophones ont été les plus grandes victimes du colonialisme que sa réaction ne fut ni de contre-argumenter, ni d’affirmer Lison désaccord, ni d’ignorer simplement ce point de vue. Non. Elle a souhaité que tous ses abonnés sachent que la seule évocation de l’importance de l’oppression vécue par les Canadiens français lui causait une violente réaction, physique — au sens propre, « viscérale » — de rejet.

Justin Trudeau, qui était fier de présenter sa nouvelle recrue dimanche à la commémoration de l’horrible tuerie de la mosquée de Québec il y a six ans, a déclaré qu’elle était la personne choisie pour « bâtir des ponts avec les Québécois et les autres Canadiens ». Si c’est vrai, on aimerait avoir la liste de ceux qui n’ont pas été retenus. Don Cherry ? Amir Attaran ?

Pablo Rodriguez qui est, comme l’a dit récemment M. Trudeau au sujet d’un autre de ses ministres, un « bon Québécois », s’est déclaré « profondément insulté et profondément blessé » par un autre propos formulé par écrit par Mme Elghawaby. En effet, dans un texte, toujours en ligne, dans l’Ottawa Citizen, cosigné par l’ex-président de la section ontarienne du Congrès juif canadien Bernie Farber et s’opposant à la loi 21, on lit : « Malheureusement, la majorité des Québécois semblent influencés non pas par la primauté du droit, mais par des opinions négatives envers l’islam. Un sondage réalisé par Léger Marketing plus tôt cette année a révélé que 88 % des Québécois qui avaient des opinions négatives sur l’islam appuyaient l’interdiction. » (Je dois avouer que j’ai moi-même des opinions négatives envers le christianisme, l’islam et toutes les autres religions.)

Cela voulait-il dire que Mme Elghawaby estimait que les Québécois sont islamophobes, selon le mot désormais accepté à Ottawa et qui signifie à la fois sentiment anti-musulman et toute critique de l’islam, quelle qu’elle soit ? Mais non ! Qu’allez-vous chercher là ? Sur son fil Twitter, la dame nous a rassurés vendredi dernier : « Je ne crois pas que les Québécois sont islamophobes ; mes commentaires passés faisaient référence à un sondage au sujet de la loi 21. » Affirme-t-elle maintenant que ce sondage était fautif ? A-t-elle de nouvelles données ?

Si elle s’est trompée dans ce texte, elle a récidivé dans un autre, de 2020, du Toronto Star. Après avoir cité un membre de la communauté musulmane de Québec, Rachid Rafah, affirmant qu’« au Québec, les gens ne peuvent pas admettre qu’il y a des problèmes dans cette société. Je ne sais pas pourquoi ». Elle ajoute : « Il n’y a pas que la plupart des Québécois qui sont dans le déni », trop de Canadiens le sont aussi.

Si on prend le temps de lire ses écrits un peu plus vieux, on ne peut que déceler une constante dans son appréciation des Québécois, superbement étalée dans ce texte de 2013 du Star sur la charte des valeurs. Elle cite d’abord le livre A Fair Country, de John Ralston Saul : « Dans tout le monde occidental dans la seconde moitié du XIXe siècle, les civilisations de la classe moyenne, enchaînées et obsédées par l’empire ont progressivement glissé vers les peurs paranoïaques du XXe siècle. Peur de quoi ? Peur de la perte de pureté — sang pur, pure race, purs traits nationaux et valeurs et liens. »

Son commentaire : « Il aurait pu écrire cela au sujet du Québec d’aujourd’hui. Les sondages favorables à la charte indiquent que [Pauline] Marois a puisé dans une paranoïa viscérale de l’autre qui hante parfois les communautés avec un effet tragique. » Elle se désole ensuite que certains se résignent à ce que « la province ne changera jamais, restant un bastion forcé et statique de la culture et de l’identité françaises ; un rêve partagé qui nie le rôle et la présence des Premières Nations au départ, et celles des minorités qui sont venues plus tard ? ».

Plus près de nous, son texte de l’Ottawa Citizen recèle une autre pépite. Elle y donne un avis bien senti, spécifiquement sur François Legault : « Le premier ministre de la province continue de nier l’existence de l’islamophobie, y compris les expériences des Québécoises qui disent avoir ressenti un racisme croissant au cours des derniers mois. Les politiciens qui flattent les tendances xénophobes doivent être appelés sur le tapis. » Bang !

Avis à ceux qui assisteront à leur première rencontre : apportez vos sacs à vomir.

 

Source: «I want to puke»

Dutrisac: Des excuses? «No thanks.»

Il faut croire que c’est en toute connaissance de cause que Justin Trudeau a nommé la militante Amira Elghawaby à titre de « première représentante spéciale du Canada chargée de la lutte contre l’islamophobie ». Même s’il avait su ce qu’elle avait écrit, il l’aurait nommée quand même, a-t-il soutenu.

Interprétant de façon abusive un sondage sur l’attitude des Québécois à l’égard de l’islam, Amira Elghawaby a écrit en 2019 que « la majorité des Québécois semblaient influencés non pas par la primauté du droit, mais par un sentiment antimusulman ». Il est difficile de savoir ce qui est pire : que les Québécois s’opposent à la règle de droit ou qu’ils soient antimusulmans. On peut constater que la représentante spéciale, pur produit de l’idéologie multiculturaliste canadienne, a pris quelques libertés avec les faits. Le communiqué du premier ministre la décrit d’ailleurs comme une journaliste primée et une militante, comme s’il n’y avait pas là contradiction dans les termes.

Un passage d’une chronique publiée dans The Globe and Mail par le professeur de philosophie Joseph Heath, de l’Université de Toronto, lui a donné envie « de vomir », avait-elle écrit spontanément sur Twitter en 2021. Un passage où l’universitaire faisait observer que le plus grand groupe de personnes qui furent victimes du colonialisme britannique au Canada, c’étaient les Canadiens français.

La thèse de Joseph Heath est pourtant intéressante. Il relève qu’au Canada anglais, on utilise l’acronyme américain BIPOC (Black, Indigenous and people of color), qui ne correspond à la réalité canadienne des relations raciales. Aux États-Unis, les Noirs représentent la minorité raciale la plus importante, et de loin, que ce soit en nombre ou en raison de son poids historique. Dans l’énumération, les Autochtones, qui représentent 5 % de la population canadienne, devraient venir avant les Noirs, qui sont trois fois moins nombreux, et les francophones avant les Autochtones en raison de leur nombre. Donc, au lieu de l’acronyme américain BIPOC, le professeur Heath propose l’acronyme FIVM (pour Francophone, Indigenous and visible minority) pour désigner les plus importants groupes minoritaires au Canada. Il souligne que contrairement aux États-Unis, où on analyse les conflits sociaux à travers « une lentille raciale », le Canada n’a pas cherché à « racialiser » les différences ethniques entre ses citoyens. L’idée qu’un immigrant débarquant au Canada en provenance d’Éthiopie a vraiment quelque chose en commun avec un descendant d’esclaves africains présents sur le continent depuis 300 ans est « non seulement une fiction : c’est une fausse représentation pernicieuse ».

Il faut croire que l’influence américaine est forte puisque, dans le communiqué du premier ministre, la description de tâches de cette nouvelle représentante spéciale amalgame la religion — la lutte contre l’islamophobie — au racisme systémique et à la discrimination raciale.

Certains voudraient qu’Amira Elghawaby s’excuse — c’est le cas du chef parlementaire du Parti libéral du Québec, Marc Tanguay — ou retire ses propos. Mais ce ne serait là que parfaite hypocrisie. La représentante spéciale du Canada incarne un courant de pensée fort répandu au Canada anglais, où l’on est viscéralement contre la conception québécoise de la laïcité et de l’équilibre recherché entre différents droits qui, dans une société, peuvent entrer en conflit.

Au débat des chefs en anglais, lors de la dernière campagne électorale fédérale, la question posée au chef du Bloc québécois, Yves-François Blanchet, dont la prémisse était que « le Québec a un problème de racisme » parce que le gouvernement caquiste a fait adopter la loi 21 sur la laïcité et la loi 96 sur la langue témoignait de ce consensus au Canada.

On peut être en désaccord avec des aspects de la Loi sur la laïcité de l’État — c’est la position du Devoir, d’ailleurs —, mais ce n’est pas une loi xénophobe ni antidémocratique. Comme le soulignait le juge Robert M. Mainville dans une décision partagée de la Cour d’appel du Québec sur une requête interlocutoire demandant la suspension de la loi 21 (présentée par l’ancien employeur d’Amira Elghawaby, le National Council of Canadian Muslims), « la conception de la symbolique religieuse et sa place dans l’espace public ne sont d’ailleurs pas perçues de façon identique par chaque société, la Loi sur la laïcité de l’État en est un exemple frappant au sein du Canada ». Et encore : « On peut constater que la question de l’égalité des sexes en regard du foulard islamique ne se prête pas à des réponses simples ou évidentes. »

Justin Trudeau a dit que la nouvelle représentante resterait en poste. Soit. Mais puisqu’elle crache (ou vomit) sur la société québécoise, que, manifestement, elle méconnaît, qu’elle reste chez elle. Le phénomène de l’islamophobie au Canada anglais devrait amplement l’occuper.

 

Source: Des excuses? «No thanks.»

David: L’huile sur le feu

Il serait absurde de nier que l’islamophobie, tout comme le racisme, existe au Québec, au même titre qu’ailleurs au Canada et un peu partout sur la planète. Le premier ministre Legault convient lui-même que nous ne sommes pas à l’abri de ces maux, même s’il réfute leur caractère systémique.

Cela dit, non seulement le raccourci pris par Amira Elghawaby pour affirmer que « la majorité des Québécois » est animée par un sentiment anti-musulman était insultant, mais il témoignait au surplus d’une malhonnêteté intellectuelle qui ne plaide pas en faveur de la nouvelle représentante spéciale du gouvernement Trudeau dans la lutte contre l’islamophobie.

S’il était vrai, comme l’indiquait un sondage Léger, que 88 % des islamophobes appuyaient la Loi sur la laïcité de l’État (loi 21), on ne pouvait pas inverser la proposition et affirmer que la majorité des partisans de la loi étaient islamophobes. Mme Elghawaby a parfaitement le droit de ne pas aimer la loi 21 et de la combattre, mais cela ne l’autorise pas à faire un procès d’intention aussi gratuit qu’injuste à ceux qui la soutiennent.

Même si on voulait lui donner le bénéfice du doute en invoquant un manque de disposition pour les mathématiques, elle a tenu dans le passé d’autres propos qui laissent peu de doute sur les sentiments qu’elle éprouve envers le Québec.

Le député péquiste des Îles-de-la-Madeleine, Joël Arseneau, s’est montré passablement indulgent en parlant d’une « incompréhension » de la société québécoise. Cela ressemble davantage à une détestation. Même le ministre fédéral du Patrimoine, Pablo Rodriguez, s’est dit « blessé et choqué comme Québécois ». C’est dire.
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On ne peut pas s’opposer à la vertu. Toute mesure visant à lutter contre l’islamophobie et à faciliter l’intégration des musulmans à la société canadienne est assurément la bienvenue.

La question est de savoir pourquoi Justin Trudeau a choisi une militante « pure et dure » comme Mme Elghawaby pour occuper un emploi qui va exiger beaucoup de doigté pour favoriser les rapprochements, au Québec comme dans le reste du pays. Lancer des anathèmes n’est assurément pas la meilleure façon d’y parvenir.

Les « clarifications » qu’elle a apportées n’ont pas satisfait le gouvernement Legault, qui exige son départ, mais M. Trudeau est tout disposé à s’en contenter. D’ailleurs, il l’aurait nommée de toute façon, a-t-il reconnu. S’il a pu être agacé par la maladresse de sa recrue, le fond de ses déclarations ne l’a manifestement pas troublé.

Le premier ministre et Mme Elghawaby partagent la même aversion pour la loi 21. Dans l’exercice de ses nouvelles fonctions, elle persistera sans doute à dire tout le mal qu’elle en pense, avec la bénédiction de son patron. M. Trudeau aurait voulu jeter de l’huile sur le feu qu’il n’aurait pas pu faire un meilleur choix.

Toute attaque contre la loi 21 provoque maintenant une réaction épidermique chez M. Legault, comme on l’a vu encore dernièrement quand son homologue canadien a réitéré son intention de la contester et de limiter l’utilisation préventive de la disposition de dérogation.

Dimanche, il brillait par son absence lors de la commémoration du massacre de la grande mosquée de Québec. Il n’avait sans doute pas très envie d’entendre les porte-parole du Centre culturel islamique lui reprocher une loi qui « vient chambarder tout ce qu’on fait comme travail pour le vivre-ensemble ».
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L’indignation provoquée par la nomination de Mme Elghawaby rappelle celle qui avait accueilli, en janvier 2021, la nomination de la géographe Bochra Manaï au poste de commissaire à la lutte et à la discrimination systémiques à la Ville de Montréal, Mme Manaï ayant été précédemment porte-parole du Conseil national des musulmans canadiens.

M. Legault avait aussi qualifié cette nomination d’« erreur » en raison de la « croisade personnelle » de Mme Manaï contre la loi 21 qui, selon elle, avait fait du Québec « une référence pour les suprémacistes extrémistes ».

Le chef du Parti québécois, Paul St-Pierre Plamondon, avait déploré que la mairesse Plante utilise des fonds publics pour « imposer son idéologie » et prédit que la nouvelle commissaire allait semer la division. Manifestement, ses propos étaient insultants. Depuis deux ans, on n’a cependant entendu personne se plaindre de son travail.

Il est sans doute de bon ton de réclamer le départ de Mme Elghawaby, mais il est clair que M. Trudeau ne reviendra pas sur sa décision. Dès lors, la meilleure attitude à adopter est peut-être celle du chef du Bloc québécois, Yves-François Blanchet, qui a réclamé une rencontre avec la représentante spéciale.

Sans se faire trop d’illusion sur son acte de contrition, le chef du Bloc se dit prêt à entendre de plus amples explications. Qui sait, lui-même pourra peut-être lui expliquer certaines choses qu’elle ignore sur le Québec. Il sera toujours temps de déchirer sa chemise si elle ne veut toujours pas comprendre.

Source: L’huile sur le feu

 

Lisée: Dire «basta!» à Roxham

More on Roxham. Current federal approach is looking rather lame:

Mettons les choses au clair. Si vous ou moi étions Haïtiens, Cubains, Guatémaltèques, entre plusieurs autres, nous remuerions ciel et terre, vendrions tous nos biens, nous endetterions jusqu’aux yeux pour arriver en territoire états-unien, prendre la route qui mène au chemin Roxham et tenter notre chance d’avoir, pour nous et nos enfants, une vie immensément meilleure au Canada.

Les informations circulent vite dans les milieux de l’immigration des pays du Sud. Il y a six ans ce mois-ci, Justin Trudeau a lancé son gazouillis annonçant « À ceux qui fuient la persécution, la terreur et la guerre, sachez que le Canada vous accueillera ». La version anglaise a récolté pas moins de 600 000 mentions « J’aime ».

Dans un premier temps, paniqué par l’afflux de demandes, Ottawa a annoncé que plus de 90 % de ces demandeurs finiraient par être renvoyés, car ne satisfaisant pas aux critères de l’asile. Plus récemment, un nouveau bilan faisait état de 50 % de refus. On sait cependant que des dizaines de milliers de personnes disparaissent dans la nature et préfèrent vivre sans papiers au Québec et au Canada plutôt que d’être reconduites dans leur pays d’origine. Vous et moi ferions pareil. D’autant qu’Ottawa prévoit régulariser sous peu la situation d’un demi-million d’entre elles.

Voyez, vos (nos) chances de succès sont passées de 10 % à 50 % à potentiellement 100 %. Venir au chemin Roxham, c’est le bon choix.

La société d’accueil doit poser ses conditions au point d’entrée. Elles doivent être précises, compréhensibles, prévisibles. Le contrat social entre nous et les futurs membres de notre société s’incarne là, dans la décision du migrant d’accepter ces conditions. Une fois ce pas franchi, notre attitude doit être d’une totale ouverture.

C’est pourquoi, ministre, j’ai appuyé les milliers de réfugiés du tremblement de terre haïtien qu’Ottawa menaçait d’expulser ; chef du PQ, j’ai dénoncé pendant la campagne de 2018 l’absurde projet de la Coalition avenir Québec (CAQ) de faire reconduire à la frontière les immigrants qui, trois ans après leur arrivée, échoueraient à des tests de valeurs ou de français ; commentateur, j’ai réclamé que tous les réfugiés et demandeurs d’asile ayant soutenu la santé et l’économie québécoises pendant la pandémie, sans exception, se voient accorder un certificat de sélection du Québec, ce que la CAQ a honteusement refusé de faire.

J’ai aussi insisté pour qu’une connaissance du français au point d’entrée soit indispensable pour les immigrants en règle, mais que le niveau de français soit modulé en fonction de l’emploi visé. (Des exemples navrants de rigidité sont bien exposés dans le documentaire Essentiels, sur Télé-Québec.)

Le refus canadien d’agir

Que faire avec Roxham ? On sait exactement quoi, et depuis le début. Ottawa n’avait qu’à utiliser la clause qui suspend notre accord avec les États-Unis pour faire en sorte que tous les demandeurs d’asile se présentent à un poste-frontière régulier. S’il ne souhaitait pas froisser les Américains, il aurait suffi de modifier la loi fédérale sur l’immigration pour appliquer à Roxham les termes de l’entente. Par conséquent, immédiatement, les agents auraient pu y refuser sur-le-champ les demandes d’asile qu’ils jugeaient non fondées, donc la moitié.

On nous annonce que la renégociation de l’entente avec les États-Unis ne sera pas finalisée lors de la venue de Joe Biden en mars et qu’il faudra attendre que le Congrès américain adopte un changement législatif, ce qui est ces jours-ci aussi facile que d’apprendre la nage synchronisée à un essaim de mouches noires.

La nouvelle ministre de l’Immigration du Québec, Christine Fréchette, a dit « basta ! » (un vocable emprunté à l’italien qui veut dire « ça suffit ! »). Oui, mais comment cette injonction se traduira-t-elle dans les faits, lorsque le flot, passé de 16 000 en 2017 à 39 000 l’an dernier, atteindra 50 000 cette année, 60 000 l’an prochain ?

Les options

Je ne connais que deux options aptes à forcer la main d’Ottawa. Certains proposent d’envoyer la Sûreté du Québec. Elle ne pourrait pas bloquer la frontière, qui relève du fédéral, mais la route, de compétence québécoise, derrière les installations fédérales d’accueil. Ce qui signifierait que les agents fédéraux continueraient de recevoir les migrants, mais ne pourraient les faire sortir de leur enclave, forçant Ottawa à renvoyer les candidats vers Lacolle. Je suis opposé à cette hypothèse, angoissante pour les migrants et politiquement intenable, car — visualisez une barricade de policiers québécois bloquant l’accès à des fonctionnaires fédéraux — d’un coût réputationnel énorme.

L’autre solution est de réclamer d’Ottawa qu’il laisse au Québec sa juste part de ces réfugiés, soit 20 %, notre poids démocratique, et qu’il se charge de répartir les autres dans le reste du pays. Sinon, le Québec le fera pour lui. En fait, Ottawa a commencé à opérer ce déplacement l’an dernier, pour environ 10 % des demandeurs. Mais il le fait de façon aléatoire et franchement indélicate, débarquant chez des migrants sans prévenir pour les conduire en Ontario. Je propose que cette démarche soit transparente et prévisible.

Le Québec prendrait en charge dès leur arrivée les francophones et les personnes qui ont de la famille immédiate au Québec, donc ceux pour qui le succès d’intégration est le plus élevé, mais reconduirait quotidiennement les autres à Ottawa ou à un lieu qui nous serait indiqué. Le second contingent en importance est formé de Nigérians, des anglophones, qui trouveront dans le ROC de meilleures conditions d’intégration. S’il existe d’autres options réalistes, je suis tout ouïe.

Une exigence de lucidité

Cette solution ne tarirait pas le flot. Seules les mesures légales fédérales précitées permettraient de le réduire de moitié. Le Québec aurait à vue de nez recueilli l’an dernier 10 000 de ces demandeurs irréguliers, donc quatre fois moins. Ce nombre pourrait doubler en quelques années, mais, au moins, ce serait gérable.

Finalement, il y a la question de savoir si, en cas de suspension de l’entente canado-américaine par Ottawa, les candidats sachant que la moitié d’entre eux seront interdits d’entrée ne franchiront pas la frontière ailleurs. Un certain nombre, oui. Le mal est fait, les passeurs sont installés, ils ont intérêt à ce que ça dure. Cependant, le nombre serait considérablement réduit, car le risque serait beaucoup plus grand.

Je sais que des lecteurs estimeront qu’il ne faut pas évoquer ces hypothèses. Ils ont raison d’estimer que chacun de ces migrants a une histoire, un espoir, une valeur humaine irréductible. Mais puisque les frontières existent, il faut les gérer. Ce qui signifie dire parfois oui, parfois non. Et ces réponses ont, sur chaque migrant, des conséquences pour toute une vie.

La lucidité exige que ces questions soient posées, puisque Justin Trudeau refuse d’agir depuis six ans. J’estime que le Québec doit dire « basta ! » à l’intenable statu quo canadien à Roxham et prendre les moyens pour opérer un vrai changement. J’estime tout aussi essentiel qu’une fois parmi nous, chacune des personnes que nous accueillons obtienne immédiatement ce premier passeport pour la dignité qu’est le droit de travailler — et pour les travailleurs agricoles, qu’ils puissent changer d’employeur à leur gré. Qu’on leur offre ensuite une passerelle rapide vers un statut de résident permanent sans leur faire subir la tartufferie d’examiner leur demande d’asile, d’en refuser la moitié, de les pousser à la clandestinité, puis de les régulariser dans une amnistie.

Bref, soyons fermes et rigoureux au point d’entrée, et mettons tout en oeuvre, ensuite, pour que ceux qui nous choisissent et qu’on a choisis obtiennent le droit, et développent l’envie, de devenir pleinement Québécois.

Source: Dire «basta!» à Roxham

Expliquer le racisme, ce n’est pas culpabiliser les Blancs: Réplique à Lisée

More on the Lisée column:

Dans sa chronique de mercredi, « Les boomers, ces racistes ! », Jean-François Lisée critique une vidéo éducative dont je suis l’auteur, intitulée Racisme, ses origines, son histoire et lue par le professeur Laurent Turcot.

Selon le chroniqueur, ma vidéo nous apprend que « ce n’est qu’en Occident qu’on “retrouve une discrimination parfaitement assumée” ». Voici l’extrait complet : « Naturellement, le racisme n’est pas exclusif aux Blancs ou encore au monde occidental, mais c’est seulement en Occident qu’on va retrouver le paradoxe de sociétés supposément égalitaires et où on retrouve également une discrimination parfaitement assumée. »

Cet extrait, qu’on entend dans la première minute de la vidéo, infirme les intentions que me prête le chroniqueur, qui m’accuse de véhiculer une « fausseté historique ». Je n’ai jamais prétendu que le racisme était exclusif à l’Occident. J’affirme même le contraire dans cette phrase qui n’est citée qu’à moitié. Par contre, il est vrai que ce n’est qu’en Occident qu’on maintenait l’institution de l’esclavage tout en prétendant que « tous les hommes naissent libres et égaux ». Les pays africains ou arabes où se pratiquait l’esclavage ne prétendaient pas partager ces idéaux universels.

Le chroniqueur poursuit : « D’ailleurs, “il faut attendre que les Européens découvrent l’Afrique noire pour qu’on puisse commencer à parler de racisme comme on l’entend aujourd’hui”. » Voilà une autre phrase citée hors contexte et vidée de son sens. Cet extrait de la vidéo explique qu’avant la Renaissance, la discrimination oppose des Blancs à d’autres Blancs — les Slaves réduits en esclavage par l’empire germanique, par exemple. Ce n’est qu’avec l’exploration de l’Afrique subsaharienne et le début du commerce des esclaves qui s’ensuit que commence l’association entre peau noire et servilité. L’objectif de la vidéo est d’expliquer comment le racisme en Occident a évolué au fil des siècles et non pas de pointer les Blancs du doigt.

Selon M. Lisée, « les jeunes sortant de ce visionnement seraient choqués d’apprendre que l’esclavage a été présent sur tous les continents, que les Africains le pratiquaient entre eux avant l’arrivée des Blancs, que les Autochtones d’Amérique le pratiquaient entre eux avant l’arrivée des colons européens ». Les jeunes seraient choqués d’apprendre cela uniquement si les enseignants d’éthique et culture religieuse se contentaient de laisser cette vidéo donner le cours pour eux. Pour avoir participé à la formation de plusieurs cohortes de futurs enseignants, j’ose croire que ce n’est pas le cas.

Dernier reproche que m’adresse le chroniqueur : « Pas un mot non plus sur le fait que les Québécois francophones furent victimes de racisme, ou du moins de discrimination linguistique. » La vidéo vise un large public et ne s’adresse pas spécialement aux élèves québécois. Mon objectif était de résumer en 20 minutes l’histoire du racisme en Occident. J’ai donc dû faire des choix. Pourquoi parler des Québécois plutôt que des Bretons, des Catalans ou de n’importe quelle autre minorité linguistique ? Lorsqu’on parle du racisme au XXe siècle en Occident, il me semble plus parlant de décrire l’antisémitisme allemand, la ségrégation américaine et l’apartheid sud-africain.

La critique de M. Lisée repose sur les intentions qu’il nous prête, à moi et à l’enseignante citée dans sa chronique : culpabiliser les Blancs en général et les Québécois en particulier. C’est un réflexe hélas répandu chez certains nationalistes, qui se placent sur la défensive dès qu’on leur parle de racisme. Si on n’affirme pas en caractères gras qu’il s’est fait pire ailleurs, que le racisme existe aussi au Canada anglais, que Montréal n’est pas Detroit et que la Nouvelle-France n’était pas la Nouvelle-Espagne, on nous reproche de faire le procès du Québec. Et une vidéo éducative se fait accuser d’être de la propagande alors qu’elle cherche seulement à expliquer et à faire réfléchir.

Jean-François Lisée a bien raison d’estimer que ma vidéo ne suffit pas à faire comprendre « la réalité du racisme et de l’antiracisme au Québec ». Je ne prétends pas le contraire, puisque tel n’a jamais été mon objectif. Je regrette toutefois de voir mon travail être considéré comme faisant partie de « la bouillie mensongère et culpabilisatrice » dénoncée par le chroniqueur.

Réplique du chroniqueur

Cher Alexandre Dumas,
D’abord, encore bravo pour vos récents ouvrages sur l’époque duplessiste. Je ne vous tiens évidemment pas pour responsable des lamentables propos tenus dans le reste du cours, mais permettez-moi d’insister : il est faux d’affirmer, comme vous le faites dans cette vidéo, que la discrimination sur la base de distinctions raciales est née avec le trafic occidental d’esclaves noirs. L’esclavage des Vietnamiens par les Chinois est vieux de 2000 ans, celui de Blancs européens par l’Empire musulman y est également antérieur et « parfaitement assumé ». Il n’est par ailleurs pas question d’être, comme vous le dites, à l’offensive ou sur la défensive sur la question du racisme et de l’esclavage, mais de respecter la réalité historique et de reconnaître à la fois la cruauté du racisme, la bravoure de ceux qui l’ont fait reculer et les réels progrès. Ainsi, j’ai été peiné de constater que vous attribuez les grandes avancées antiracistes états-uniennes des années 1960 à des impératifs de politique africaine de Washington plutôt qu’au colossal travail de Martin Luther King et des Noirs américains appuyés par un grand nombre de Blancs, dont plusieurs juifs, qui ont mis leur vie en danger pour cette cause.

Bien cordialement,
Jean-François Lisée

Source: Expliquer le racisme, ce n’est pas culpabiliser les Blancs

Lisée: Les boomers, ces racistes!

Of note, how good program intentions can go wrong:

Revêtus de notre cape d’invisibilité, assoyons-nous à l’arrière d’une classe de cinquième secondaire de la région de Montréal en ce frisquet mois de janvier pour être instruit sur le problème du racisme dans le cours Éthique et culture religieuse.

Nous avons d’abord droit à une définition classique du racisme : la conviction que certaines races sont supérieures aux autres. Bien. Qu’en est-il chez nous ? « Selon les chiffres de Statistique Canada, Statistique Québec, affirme l’enseignante, 59 % des Québécois se prétendent racistes. 59 %, c’est énorme. Alors, quand le gouvernement dit qu’on n’est pas racistes, c’est pas vrai, hein. Les chiffres parlent plus fort que les mots. »

Ça commence fort. Ce pourcentage existe : il vient d’un sondage Léger de 2007 et cumule les réponses « fortement, moyennement ou faiblement racistes ». Léger n’avait cependant pas demandé si les Québécois estimaient certaines races supérieures aux autres. Angus Reid l’a demandé pas plus tard qu’en 2021 et a trouvé que 9 % des Québécois partageaient cette odieuse conviction, comparativement à 12 % des Canadiens et (cramponnez-vous) à 18 % des membres des minorités visibles.

Mais ne chipotons pas, continuons d’écouter la prof qui assène cette vérité : « Le Québec est la province la moins tolérante et la moins accueillante du Canada. » Mais d’où vient notre propension à autant détester l’autre ? Pas des générations dont font partie la prof et ses élèves, précise-t-elle. Alors qui ? Voici l’extrait complet de l’enregistrement audio qu’une bonne âme m’a fait parvenir : « Ça s’explique avec la génération des baby-boomers — vous connaissez ? —, donc ceux qui ont grandi dans les années 1950 et 1960. Et qu’est-ce qui est arrivé de majeur dans les années 1950 et 1960 ? Il y a eu des grosses vagues d’immigration. Ç’a créé un choc culturel que certains d’entre eux n’ont pas encore digéré. Nous, on est habitués de vivre avec d’autres cultures, mais cette génération-là, au départ, ne l’était pas.  » Heureusement, ce problème va finir par disparaître de lui-même.

Mais il continue de sévir car, nous dit l’enseignante, « le taux de discrimination au travail est de 57 % ». Je n’ai pas trouvé de source pour ce taux et, s’il est certain que la discrimination à l’embauche est bien documentée, la situation actuelle (2021) est que le taux d’emploi des Québécois issus de l’immigration est supérieur (69 %) à celui des Québécois de souche (63 %).

Mais ne chipotons pas. Les élèves visionnent ensuite un documentaire de 20 minutes de l’historien Julien Talbot intitulé Racisme, ses origines, son histoire. On y apprend que ce n’est qu’en Occident qu’on « retrouve une discrimination parfaitement assumée ». D’ailleurs, « il faut attendre que les Européens découvrent l’Afrique noire pour qu’on puisse commencer à parler de racisme comme on l’entend aujourd’hui ». On peut — et l’on doit — dénoncer jusqu’à plus soif le racisme occidental, mais les jeunes sortant de ce visionnement seraient choqués d’apprendre que l’esclavage a été présent sur tous les continents, que les Africains le pratiquaient entre eux avant l’arrivée des Blancs, que les Autochtones d’Amérique le pratiquaient entre eux avant l’arrivée des colons européens.

Motus aussi sur le fait, non contesté, que la plus grande opération mondiale d’esclavage de l’histoire fut musulmane, les États musulmans ayant cumulativement mis environ un million de chrétiens en esclavage à partir du XVIe siècle. Pas un mot non plus sur le fait que les Québécois francophones furent victimes de racisme, ou du moins de discrimination linguistique.

Bref, en 55 minutes, le cours réussit à cumuler une fausseté historique — le racisme est occidental —, une fausseté nationale — les Québécois sont massivement racistes —, une fausseté canadienne — le Québec est l’endroit le plus raciste au Canada — et une fausseté générationnelle — c’est la faute des baby-boomers. C’est beaucoup.

Je ne jette pas la pierre à cette enseignante, car elle relaie le discours dominant. Mais à l’heure où l’on invente un nouveau cours de citoyenneté québécoise pour remplacer le cours ECR, il faut saisir l’occasion de mieux enseigner à nos jeunes ce que sont le racisme et l’antiracisme.

D’abord, en donnant un portrait juste de l’universalité du racisme et de l’esclavage. Ensuite, en expliquant comment, au sein de l’Amérique du Nord et du Québec, les forces d’oppression et de libération se sont opposées à travers les siècles. Il faut avoir la franchise de parler à la fois de l’esclavage autochtone, de celui qui a eu cours en Nouvelle-France, puis d’indiquer que c’est au Québec que ce fléau a été aboli de facto avant qu’il ne le soit dans le reste du Canada, dans l’Empire britannique et aux États-Unis. C’est aussi d’abord au Québec que les Juifs ont été reconnus comme des citoyens à part entière, avant le reste de l’empire.

Et si on tient à parler des baby-boomers, admettons qu’ils n’ont certes pas réussi à juguler le racisme envers les Autochtones, les Noirs ou les Arabes, mais qu’ils ont ouvert grands les bras aux réfugiés chiliens, vietnamiens et haïtiens alors même qu’ils se battaient contre des patrons qui refusaient de les embaucher, eux, dans des positions de pouvoir ou de leur parler dans leur langue. Et alors qu’ils se battaient, de l’autre main, pour les droits des femmes et des gais.

La réalité du racisme et de l’antiracisme au Québec déborde largement les cases caricaturales dans lesquelles on tente de l’enfermer. Enseigner à la future génération que depuis Champlain — le plus égalitariste de tous les colonisateurs européens — jusqu’aux baby-boomers, nous avons eu notre part de racistes et d’antiracistes, de brutes et de héros (et qu’au fil du temps, les seconds l’ont généralement emporté sur les premiers ), leur dire que ce juste combat leur incombera bientôt à eux, me semble autrement plus juste historiquement — et motivant pour les progrès à venir — que la bouillie mensongère et culpabilisatrice qu’on les force aujourd’hui à ingurgiter.

Source: Les boomers, ces racistes!

Lisée: Quebec’s plan to eradicate English

Clever piece but unlikely to convince many:

It’s much worse than everything you’ve heard. The assault on the Anglo minority in Quebec has been best summed-up by Marlene Jennings: it is, she said, a “perfect formula” for “eradication.” She should know. The former Liberal MP headed until recently the Quebec Community Groups Network, spearheading the fight against François Legault’s many-pronged and still evolving eradication plan.

The numbers don’t lie. Quebecers who have English as a mother tongue account for 8 per cent of the population. But what of the ability to attract newcomers into the Anglo fold, given the enormous power of attraction of French on the continent? The proportion of Quebecers that uses English more than French in their daily lives is only 14 per cent. That doesn’t even double the count. Granted, 44 per cent of all Quebecers do speak English as do close to 80 per cent of young francophone Montrealers, but that is poor consolation.

Case in point: Quebec’s intolerant immigration policies has only let into the Montreal area about 90,000 unilingual English-speaking newcomers in the last three years — since the election of the governing CAQ — which barely adds 14 per cent to the Anglo population, so you can see where this is headed.

Everybody knows that the CAQ language bill, now in effect, will crack down on any doctor or nurse who would dare speak English to anyone not member of the “historic Anglo community,” meaning those who attended school in English. The actual text of the law tries to hide this fact by stating that French is required “except in health,” and then a specific section gaslights jurists by saying it specifically does not apply to the general statute on health and social services. 

Don’t be fooled by the fact that other law compels hospitals in all regions to set up English speaking access plans and to render services in English for anyone who asks for them. In reality, Anglo Quebecers have little other resource than to rely on the 37 institutions of the English public health network, which barely employs 45 per cent of the Island of Montreal’s health workers. 

Outside that small cocoon, English speakers needing medical care will be lucky if they fall in the hands of the puny proportion of French doctors that actually speak their language: 88 per cent. It is clear to anyone who follows these issues that French Canadians outside Quebec would revolt if their access to health in their language was that dire.

It’s even shoddier, of course, in the labour market. Toronto readers know, thanks to Globe and Mail columnist Andrew Coyne, that “the law prohibits the use of any language but French in the province’s workplaces, large or small, public or private.” Specifically, the new law extends to mid-sized shops, the regulation having existed for 35 years in larger ones. 

The damage is already done: in the last census, the proportion of workers in the Montreal area who used mostly English at work was down to 20 per cent, those who use it regularly down to 49 per cent. Why aren’t all these people fined by the language police? 

Corruption, laziness and incompetence, endemic in Quebec as famously reported in Maclean’s magazine, are surely the only explanation for this lack of enforcement, hidden perhaps behind a slew of exceptions enabling anyone to speak any language to clients, suppliers, the head office, or colleagues, provided French is the “usual and habitual language of work.” Usual and habitual, which are, of course, code words for intransigence. Now if someone would be foolish enough to impose, say, English as the “usual and habitual language of work” in Toronto or Mississauga, all hell would break loose.

In Quebec, only 14 per cent of management positions are held by the 8 per cent of Anglos, which gives them a ridiculously small systemic advantage. Thank God for the rebel CEOs of Air Canada, SNC-Lavalin, the Laurentian Bank, the Canadian National and Couche Tard, proud unilingual Anglos, who enable all their senior staff and secretaries to revel in English, whatever their linguistic background. That’s inclusion.

Language oppression is Quebec is particularly offensive in education. René Lévesque’s Bill 101 famously took away the linguistic choice for K-12 to all, except Anglos and immigrants going to English schools prior to 1977, who retain the right to choose and pass it to their descendants for all eternity, and any English-Canadian of any background schooled in English moving to Quebec anytime and their descendants, for all eternity. Appalling.

Granted, the 8 per cent of Anglos have access to 17 per cent of spots in colleges and 25 per cent of universities, with 30 per cent of research grants. The new law would actually cap the Anglo Cegeps at merely double the presence of Anglos in the population. Not only that. These institutions of higher learning used to properly shun Anglo high schoolers that had lesser grades and give their spots to French students bright enough and bilingual enough to enrol there. The anti-Anglo nationalist government now forces these colleges to give precedence to Anglo students in enrolment, thus forcing Anglo institutions into debasing themselves by catering to lesser Anglos. Shameful, really.

Now for the coup de grâce. The inward-looking Quebec government seems to have it in it’s head that Anglo kids should be proficient enough in French to succeed in a work environment where French is still, alas, unavoidable. By law, all Anglo high schoolers with diplomas in hand are deemed bilingual. So why bother asking them, in college, to hone this skill? This idea is so bonkers that when the Quebec Liberal party proposed that Anglo students attend three classes IN French, (alongside their French colleagues who follow ALL classes in English), the scandal was enormous. 

The federation of colleges announced that a full third of Anglo students would fail. Not fare badly, but fail. Pretending that a bilingual person could actually read texts, attend lectures and render a paper in another language is of course nonsensical. One Anglo CEGEP director, Christian Corno, hit it on the nail by writing, in French, that this abomination was motivated by a willingness “to make Anglo students atone for the sins of their ancestors” (who may or may not have oppressed the French in the past, a debatable assertion). 

The fallback position has been to increase the number of French classes that these poor students should take, from two to five. This, also, puts their grades in jeopardy. Forcing students to learn the language of the majority of the population where they live and will work is an unacceptable imposition, surely unheard of anywhere else in the world.

The relentlessness of Quebec’s assaults on minority and religious rights extracts a heavy toll on its international reputation and attractiveness. Last year, only 177,000 foreign temporary workers and students were in the province. Yes, it is triple the usual amount and an all-time high. But just think of those who didn’t come. 

Foreign investment is repelled by the current intolerant climate. FDI in the Montreal area only jumped 69 per cent to a record high of $3.7 billionlast year but this is only attributable to Quebec boasting a recent growth rate greater than that of any G7 countries, Canada included. The fact that these newcomers and investors came to Quebec after the controversy and adoption of the secularism bill and during the language bill controversy simply points to the paucity of information available to them.

Thankfully, for the first time in history, the number of Ontarians moving to Quebec outpaced the number or Quebecers moving to Ontario. It used to be that, each year, 3,000 to 9,000 more Quebecers would leave for Ontario than the other way around. But given the new toxic environment, the flow has flipped and, last year, almost a net 800 brave Ontarianscrossed the Ottawa River to settle in Quebec. (In total, an astonishing 29,000 citizens moved from the Rest of Canada to Quebec in 2021.) Not for lower housing prices or better services or job outlook, but simply, surely, to contribute in defeating the eradication plan afoot. More will be needed. 

Please, come in droves! Hurry, before the last English word is ever spoken in Quebec.

Jean-François Lisée is an author, a columnist for Le Devoir and a former head of the Parti Québécois. This text may contain traces of irony. One may find his rants at jflisee.org

Source: Quebec’s plan to eradicate English

How a Quebec student’s hijab became the target of a political and cultural storm

Groundhog Day…

The photograph on the Montreal business school’s website was intended to demonstrate a young woman’s possibility and her academic success.

“A rewarding international presence,” reads the blurb beside the photo, written in a black font to match the black cloth hijab wrapped around the head and neck of the woman’s smiling face.

There is not much more that would stand out as unusual in the promotional image of the Algerian exchange student at the HEC Montréal — an image the school uses to tout its international programs, a deep and important revenue stream for the institution, as it is for most other Canadian universities.

But when Jean-François Lisée, a prominent Quebec academic, writer and former politician, viewed the image last weekend, he saw it not as a ploy by a public institution in search of private funds.

Instead, the former leader of the sovereigntist Parti Québécois flared at what he took to be a breach of the secular codes that Quebec governments have been trying to establish over the past two decades to separate religion and the state.

Those efforts culminated in 2019 with the passage into law of Bill 21, which enshrines state secularism, mainly by banning public-sector workers from wearing items of religious clothing or decoration, including crucifixes, turbans and hijabs, while at work.

“University students can display their convictions, religious or not,” Lisée wrote on Twitter. “But for a public institution that is by definition secular, pro-science and pro-gender equality to normalize a misogynistic religious sign in an ad is unacceptable.”

The rebuke from a man who has straddled Quebec’s media and political realms for more than 40 years cast the province back into a fraught debate that it cannot seem to resolve.

Increasingly present in the form of turbans, hijabs and kippahs, at least in part due to immigration patterns in the province, many of Quebec’s white, francophone majority would apparently prefer that religion be neither seen nor heard from in the public sphere.

But each instance of religion rearing its head, reigniting the debate over the place of religious expression in a secular society, is like a freshly formed scab over a cut that is pulled away, exposing the wound to the sting of fresh air.

Kimberley Manning calls them “moments of punctuation” that revive the frequently noxious debate that, in her opinion, risks revictimizing religious minorities in Quebec.

“They contribute to and exacerbate an ever-present experience of not being fully Quebeckers,” says the associate professor of political science at Montreal’s Concordia University. “This is what seems to be coming through in the polling and the research.”

Manning has done her own work, notably a March study of students that found feelings of discrimination that respondents linked to the province’s secularism law.

A more extensive study of Bill 21’s impacts in Quebec, released this week, contends that the law has created a frightening, oppressive and grim environment for religious minorities.

In surveys, Jews, Sikhs and Muslims reported a deterioration in their likelihood to participate in social and political life in the province, in their sense of personal safety, and in their confidence for future prospects.

“(The law) promises all kinds of very noble values, and when we measured those up against the results in the study, we see that it doesn’t achieve those values of neutrality, equality and social harmony,” says Miriam Taylor, director of publications and partnerships with the Association of Canadian Studies.

What the law — most any law — does do is normalize and concretize the biases which underpin it, Taylor says.

Survey respondents said they had experienced a rise in verbal abuse, threats and physical confrontations since the law was adopted.

This jibes with anecdotal evidence and a general sense of uncertainty and anxiety in Quebec’s Muslim communities, says Lina El Bakir, Quebec Advocacy Officer for the National Council of Canadian Muslims.

“When you set out a law that is discriminatory, you allow that to permeate society and people’s views,” she says.

“It affects mental health, it affects security, it affects the ability to just be, you know?”

Lisée, who declined an interview request, said in his criticisms that his beef was not with the Algerian exchange student in the hijab, but with the business school.

The website content in question does not breach any aspects of the provincial law, but he said it sends a message to young Algerians standing up to the pressure of imams and fundamentalists that the school “is not your ally.”

An HEC Montréal spokesperson says the only goal of the image was to show off the diversity of its student body, which includes 3,746 international students from 142 countries. The image will come down from the site next week — not because of Lisée’s indignation but because that’s when its previously scheduled two-week publication run ends.

That may come as a relief to the student, who came to Montreal to obtain a business degree and now finds herself in a debate that is part polisci, part sociology — one that has been going on so long that at least part of it belongs to the annals of history.

Speaking to La Presse columnist Rima Elkouri, the 22-year-old, who declined the Star’s interview request, explained she was initially nervous about coming to study in Canada. She had heard about the killing of four members of the Afzaal family of London, Ont., who were run down by the driver of a pickup truck on June 6, 2021, in what police allege was a hate-motivated attack.

But, Nouha, who was identified only by her first name, said she quickly warmed to her new home in Montreal.

“I have never suffered from discrimination or a lack of respect,” she told the Montreal newspaper.

She said that wearing the hijab was a personal decision, not one forced upon her by her family, though she acknowledged the women who have no choice in the matter.

“I’m against that,” she said, adding that she considers herself a feminist.

“I’ve never found (the hijab) to be a symbol that diminishes the value of a woman. Personally, I consider myself to be a very strong woman. In a few years, I’ll be managing a team of workers. I can’t afford to see myself as a weak person.”

She also said she acknowledges and understands the principles of secularism in Quebec.

“I understand that the school must be truly neutral. But from my point of view, it’s also important to display people from minority groups because those minorities look for a place where they feel at peace.”

The issues on display are not going away.

Before the end of the month, Quebec will be into a provincial election campaign and parties have often fallen back on identity issues to stir up the passions of their voters.

Taylor said she worried about the negative consequences of a campaign in which religion and secularism, majority views and minority rights were “instrumentalized for political gain.”

Before the end of the year, Quebec’s court of appeal is expected to hear a legal challenge to Bill 21. And in Ottawa, Justin Trudeau’s Liberal government has already promised to challenge the provincial secularism law at the Supreme Court.

Taylor’s study found that support for the law among Quebeckers would drop considerably if the Supreme Court ruled that it violated the Constitution.

This bolsters El Bakir’s contention that Quebeckers, like other Canadians, value human rights, despise discrimination and strive for equality.

But she reverts to her native French, and invokes the most Quebecois of expressions, to explain that an older segment of the Quebec population support secularism because they remember when the Catholic Church exerted strict control over all aspects of the province —from schools to hospitals to politics to family life.

“It doesn’t take the head of Papineau!” she says, in reference to Louis-Joseph Papineau, a leader of the rebel Patriote movement in 19th century Lower Canada who was reputed for his intelligence.

“I do understand where older generations are coming from, however societies evolve and we need to understand that realities do change, and one narrative doesn’t always apply.”

Source: How a Quebec student’s hijab became the target of a political and cultural storm