Dejean | Faut-il tolérer la tenue d’activités religieuses dans l’espace public?

The latest Quebec religion/laïcité debate:

Une prière organisée le dimanche 16 juin par une communauté musulmane dans le parc des Hirondelles (Ahuntsic-Cartierville) a suscité une controverse, au point que la mairesse de l’arrondissement est allée en ondes pour justifier la tenue de l’événement. Il faut souligner qu’il ne s’agissait pas d’une première fois, mais la diffusion sur les réseaux sociaux d’une vidéo montrant des musulmans, en marge d’un rassemblement en soutien à la Palestine, priant aux intersections de Stanley et Sainte-Catherine n’est sans doute pas étrangère à la controverse.

Ces deux événements posent plusieurs questions : faut-il tolérer la tenue d’activités religieuses dans l’espace public ? Et si oui, à quelles conditions ? Et parmi les traditions religieuses qui organisent des activités religieuses dans l’espace public, l’islam fait-il l’objet d’un traitement différentiel ?

Dans une chronique en date du 12 juin, Richard Martineau déclarait : « Imaginez des gens avec des croix qui décident, eux autres, en plein milieu du centre-ville de Montréal, ils arrivent et puis ils prient avec des croix et puis Jésus et puis tout ça. On aurait raison de dire : “ça, c’est des crinqués”. Les gens diraient : “L’extrême droite chrétienne, l’extrême droite catholique, ça a pas de bon sens.” »

J’invite donc le chroniqueur à participer le 13 juillet prochain à La marche pour Jésus, qui correspond précisément à ce qu’il décrit. Lors de l’édition de 2023, plusieurs centaines de chrétiens — majoritairement protestants évangéliques — défilaient dans le centre-ville de Montréal (sur René-Lévesque et Sainte-Catherine), distribuaient des dépliants qui invitaient les passants à « donner leur vie à Jésus », tandis que des haut-parleurs diffusaient de la musique pop chrétienne. Étrangement, personne ne s’en est ému.

De la même façon, la présence de membres de l’Association internationale pour la conscience de Krishna, plus connus sous le nom des « hare krishna » en référence au mantra que les fidèles scandent en musique, à proximité de certaines stations de métro de Montréal ou encore les opérations de prosélytisme de prédicateurs évangéliques dans les transports en commun ne suscitent pas vraiment de réaction.

La controverse autour de la prière dans le parc des Hirondelles, tout comme La marche pour Jésus ou encore les nombreuses processions organisées par des groupes religieux à proximité de leurs lieux de culte, remet sur le devant de la scène la question de savoir si l’expression collective du religieux doit être autorisée dans l’espace public. Quand un chroniqueur comme Richard Martineau, dans la même chronique que celle citée précédemment, déclare : « Que tu pries dans une mosquée, que tu pries chez toi, j’en ai rien à foutre. Mais prier dans la rue, c’est une manifestation de force, c’est un symbole », il se positionne en faveur d’une limitation du religieux à l’espace domestique ou cultuel.

Cette position, assez courante, se fonde sur l’idée que la neutralité de l’État passe nécessairement par l’évacuation de toute manifestation religieuse de l’espace public. Une telle idée est rendue possible par l’ambiguïté de l’expression « espace public », à la fois « sphère publique » (domaine du politique et de la discussion démocratique) et espace géographique de circulation ouvert à toutes et tous (les rues, les places, les parcs…).

Si la laïcité implique bien une neutralité de la sphère publique envers les différentes traditions religieuses, il n’en va pas de même de l’espace public au sein duquel les différentes visions du monde (notamment religieuses) peuvent s’exprimer librement, dans les limites de ce qui est autorisé par la loi. Il serait d’ailleurs malvenu dans une société libre et démocratique que l’État en vienne à réguler l’expression des convictions de ces citoyennes et citoyens.

Pour autant, faut-il accepter toutes formes d’expression collective du religieux sur la base du respect de la liberté de conscience et de religion énoncées dans les chartes ? Il apparaît que non, et l’on a tendance à oublier que le premier article de la Charte des droits et libertés de la personne rappelle que ceux-ci ne sont pas absolus et peuvent être restreints « dans des limites qui y sont raisonnables et dont la justification peut se démontrer dans le cadre d’une société libre et démocratique ».

Ajoutons que, sur un plan pratique, la Ville de Montréal possède un Règlement concernant la paix et l’ordre sur le domaine public qui permet d’encadrer la tenue d’activités, quelle qu’en soit la nature. Par exemple, l’article 10 stipule que « l’initiateur ou l’organisateur de tout défilé, parade, procession, marathon, tour cycliste, doit présenter au directeur du Service de la circulation et du transport une demande d’autorisation à cette fin, au moins 30 jours avant la date prévue pour l’événement ». Sur cette base, il est possible d’évaluer de façon objective les conséquences, et les nuisances potentielles, de la tenue d’activités dans l’espace public.

Frédéric Dejean est professeur au département de sciences des religions de l’Université du Québec à Montréal.

Source: Idées | Faut-il tolérer la tenue d’activités religieuses dans l’espace public?

More reasonable, IMO, than the contrary view expressed by Nadia El-Mabrouk and the Rassemblement pour la laïcité: Idées | Les parcs ne sont pas des lieux de culte

Le rapport sénatorial sur l’islamophobie est le fruit d’une intoxication idéologique

The Quebec laicité perspective on the recent Senate report:

Irresponsable ? Catastrophiste ? Incendiaire ? On hésite sur le bon adjectif à utiliser pour décrire le rapport sur l’islamophobie que le Comité sénatorial permanent des droits de la personne (CSPDP) vient de déposer.

Les attentats à la mosquée de Québec et de London ont profondément bouleversé les Canadiens. Tous les crimes haineux mentionnés dans le rapport sont inacceptables, et les gouvernements ont la responsabilité de les combattre et doivent tout mettre en oeuvre pour favoriser la coexistence pacifique et la sécurité de leurs citoyens. Mais amplifier indûment la menace en dépeignant un climat de terreur pour les musulmans canadiens ne peut que nuire davantage. Les chiffres de Statistique Canada infirment d’ailleurs cette thèse alarmiste. Pourquoi taire, par exemple, que les populations noire et juive sont, et de loin, davantage victimes de crimes haineux ?

Ce rapport, s’il suggère bien quelques rares mesures raisonnables, préfère brosser un tableau hideux et sans nuances de la situation des musulmans canadiens. Ils se sentiraient attaqués, des femmes et des filles auraient « peur de quitter leur domicile pour aller au travail et à l’école », certains subiraient même de l’islamophobie tous les jours.

Définition, laïcité et idéologie

C’est que la définition proposée de l’islamophobie est très large afin d’englober le plus de cas possible. Par exemple, le fait de ne pas accorder aux musulmans, dans le milieu de travail, des locaux et du temps pour les prières est considéré comme relevant de l’islamophobie, au sens de racisme antimusulman (p. 66). L’approche intersectionnelle, comme les notions d’islamophobie systémique et de micro-agressions inconscientes, permet également d’amplifier le phénomène.

Le rapport reconduit également une compréhension hautement caricaturale de la Loi sur la laïcité de l’État. Les témoins interrogés, qui confondent le respect des personnes avec le respect absolu des préceptes de l’islam, « s’entendent tous pour dire que la loi 21 est discriminatoire, qu’elle a exacerbé l’islamophobie et qu’elle devrait être abrogée » (p. 65). Elle est même accusée de « déshumaniser les personnes ». On le voit, le CSPDP n’a pas entendu comme témoin un seul des nombreux musulmans qui soutiennent la loi 21.

Le rapport évite également de penser la réalité de l’islamisme violent et la peur légitime qu’il soulève, y compris chez les musulmans. Seul Rachad Antonius, parmi les 138 témoins entendus lors des 21 séances publiques, ose en traiter expressément, mais le rapport le passera sous silence. Il n’y aurait, à entendre les autres témoins, que des préjugés et des stéréotypes à combattre à grands coups de campagnes médiatiques et de formations obligatoires contre les biais inconscients pour tous les fonctionnaires et les élèves.

Le rapport ne retient que ce qui appuie une conclusion tirée d’avance. Tout écart statistique, comme la sous-représentation des musulmans chez les fonctionnaires ou leur surreprésentation dans les prisons, est compris comme une « preuve » d’islamophobie systémique, sans qu’il y ait recherche d’une explication plus plausible. Le rapport confond également idéologie et science en prétendant, sans justification, que « la plus grande menace pour la sécurité nationale provient des groupes militant pour la suprématie blanche » (p. 50). On taira donc un document sur la stratégie antiterroriste du Canada qui précisait pourtant que « l’extrémisme islamique violent est la principale menace pour la sécurité nationale du Canada » .

Une offensive contre les institutions chargées de la sécurité

Ce sont assurément les instances responsables de la sécurité nationale qui hantent ce rapport. Cinq des 13 recommandations y sont d’ailleurs consacrées, mais vont dans le sens opposé à celui qu’on attend de la part d’un comité sénatorial crédible. C’est que ce dernier semble surtout à la remorque des recommandations du Conseil national des musulmans canadiens (CNMC), contre lesquelles nous faisions déjà une mise en garde ici.

Le CNMC ne réclame en effet rien de moins que l’interruption de la stratégie nationale de lutte contre l’extrémisme violent et la radicalisation, et la suspension de la Division de la revue et de l’analyse (DRA) de l’Agence de revenu du Canada (ARC), qui est chargée de repérer les menaces de financement du terrorisme au Canada qui s’exercent par l’entremise d’organisations caritatives. Il propose plutôt que soient scrutés les organismes de sécurité nationale, dont le Service canadien du renseignement de sécurité, et les services frontaliers du Canada, qu’il soupçonne de pratiques racistes, xénophobes, islamophobes et même de subir la « pénétration de la suprématie blanche ».

Le CSPDP approuve tout cela et affirme que « les lois, les politiques et les pratiques relatives à la sécurité nationale sont profondément ancrées dans l’islamophobie et continuent de perpétuer des préjugés à l’encontre des musulmans » (p. 51). La preuve ? Soixante-quinze pour cent des révocations d’associations caritatives posant le plus grand risque de financement du terrorisme au Canada visaient des organismes musulmans, alors que ceux-ci représentent moins de 1 % de l’ensemble des organisations caritatives (p. 57). Malgré le témoignage de Sharmila Khare (directrice générale de la Direction des organismes de bienfaisance de l’ARC), selon lequel « les vérifications de la DRA ne sont entreprises que lorsqu’il y a un risque d’abus terroriste », le rapport conclut néanmoins que la DRA « fait preuve d’un parti pris structurel à l’encontre des organismes de bienfaisance musulmans » (p. 58).

Le simple fait que le modèle d’évaluation du ministère des Finances soit axé sur le risque serait même, selon le professeur de droit Anver Emon, « une déclaration explicite d’islamophobie » . Mieux, qu’un Canadien voyageant à Gaza et combattant pour le Hamas devienne suspect pour le gouvernement serait, ajoute-t-il, un « exemple d’islamophobie systémique » ! Faut-il vraiment relever que le CSPDP perd ainsi toute crédibilité en « oubliant » que le Hamas est sur la liste des entités terroristes du Canada ? Qu’en amalgamant islam et islamisme violent sous le parapluie de l’islamophobie, il mine le sentiment de sécurité de ses citoyens ?

Comment expliquer pareille intoxication irresponsable ? Une partie de l’explication réside peut-être dans le fait que la présidente de ce comité sénatorial, Salma Ataullahjan, est toujours conseillère au CNMC. Rappelons, pour finir, que cette organisation fait partie des plaignants qui sont devant les tribunaux pour faire invalider la loi 21.

Source: Le rapport sénatorial sur l’islamophobie est le fruit d’une intoxication idéologique

Neutral coverage below:

Islamophobia remains a persistent problem in Canada and concrete action is required to reverse the growing tide of hate, says a new Senate report released Thursday.

“The evidence is clear. Islamophobia is an acute threat to Canadian Muslims and urgent action is needed,” Sen. Salma Ataullahjan, chair of the Senate human rights committee, told reporters Thursday.

“We must commit to building a more inclusive country and to better promoting our Muslim relatives and friends, neighbours and colleagues.”

The report, the first of its kind in Canada, took a year and involved 21 public meetings and 138 witnesses.

The report said the committee “was disturbed to hear that incidents of Islamophobia are a daily reality for many Muslims, that one in four Canadians do not trust Muslims and that Canada leads the G7 in terms of targeted killings of Muslims motivated by Islamophobia.”

The report’s finding that one in four Canadians do not trust Muslims comes from a submission to the committee from Maple Lodge Farms, a supplier of Halal meat in Ontario’s Peel region, which said it gathered the information from a “national survey” it conducted of 1,500 Canadians.

The submission does not provide details on how the respondents were chosen or what specific questions they were asked.

The report found that Muslim women have become the “primary targets when it comes to violence and intimidation” because they are easily recognizable from their attire. As a result, many are afraid to leave their homes for work, school or other activities.

“The profound effects of gendered Islamophobia are such that it compels certain women to consider removing their hijabs to enhance their employment opportunities,” the report said.

“Testimonies highlighted the fact that Islamophobia in the workplace is not merely the consequence of a handful of people’s actions; rather, it is a systemic issue that is widespread.”

The report said that as a result, Arab women have the highest unemployment rate of any demographic group in the country.

Sen. Mobina Jaffer, Canada’s first Muslim senator, told reporters Thursday that in 2001, not long after 9/11, she was flying from Vancouver to Ottawa with about 60 members of her family when she and her husband were singled out by airport authorities.

“Coming from a refugee background to be appointed by [former prime minister Jean] Chrétien to be a senator was a great pride for my family,” Jaffer said. “And my husband and I both were called outside. And my husband and I both had to completely undress … and I don’t wish that on anybody.”

‘A confirmation of what we have been seeing over many years’

Uthman Quick, the director of communications for the National Council of Canadian Muslims (NCCM), told CBC News that the council was satisfied to see the report highlight the poor treatment of Muslim women in Canada, which he said is a growing problem.

“I think the report is really a confirmation of what we have been seeing over many years, but particularly over the last few weeks, since October 7,” he said.

Quick said there has been an increase in the number of Islamophobic incidents reported to the NCCM since the starte of the recent conflict between Israel and Hamas, a group designated as a terrorist organization by the Canadian government and other nations.

“I am hoping the recommendations are followed through upon. Now more than ever, we can see that they are absolutely needed,” Quick said.

Islamophobia and the media

The report said that the problem can be blamed in part on negative and pervasive stereotypes of Muslims the report said have mischaracterized “concepts of sharia, jihad and hijab.”

“The recurring portrayal of Muslims in media has entrenched these stereotypes, leading them to become falsely accepted as truth,” the report said.

The report found that hate-based information being spread on social media remains a growing problem, with more than 3,000 anti-Muslim social media groups or websites active in Canada.

“The frequency of hate speech and misinformation on social media platforms such as Facebook, X (formerly Twitter) and Instagram was a common concern for [committee] witnesses,” the report said.

A written submission to the committee from Meta, Instagram and Facebook’s parent company, said its efforts to combat Islamophobia are a “work in progress.” It said it is taking steps that include monitoring hate speech and engaging with Muslim communities.

Representatives from X did not appear or make a submission to the committee.

Recommendations

The report makes a number of recommendations for the federal government:

  • Ensure mandatory, regular training on Islamophobia for all federal government employees and the judiciary.
  • Launch a multimedia campaign and educational resources on Islamophobia that can be incorporated into classrooms.
  • Provide additional money to address hate-motivated crimes.
  • Increase specific Criminal Code offences for hate-motivated crimes.
  • Review the Canadian Radio-television and Telecommunications Commission’s mandate to ensure it reflects the needs, interests and aspirations of racialized communities.
  • Introduce legislation to crack down on online hate.
  • Review national security legislation to ensure it takes Islamophobia into account.
  • Modernize the Employment Equity Act to ensure it takes Islamophobia into account.

The report also recommended the federal government introduce legislation in a number of areas to help the Canada Revenue Agency better understand the context for audits of religious organizations and provide quicker decisions on appeals.

The report said that in 2021, 144 anti-Muslim hate crimes were reported to police across the country, with an additional 1,723 crimes reported that were motivated by racial or ethnic hatred.

According to Statistics Canada data used to write the report, there were 223,000 reported cases of hate crime in general in 2020, but the report said those numbers fail to provide a complete picture of hate-motivated violence against Muslims in the country.

Mohammed Hashim, executive director of the Canadian Race Relations Foundation, is quoted in the report telling the committee that only one per cent of reported hate crimes are reported to police and only a fraction of those result in charges.

“Muslims in Canada feel like they are under attack. The psychological impact of constant fear and vigilance is a heavy burden,” the report said.

“Survivors of violent Islamophobia live with the trauma of their direct experience, while countless others live with vicarious trauma brought on by justified fear that their communities are not safe.”

Source: Senate report on Islamophobia says urgent action needed to reverse rising tide of hate

La lutte contre l’islamophobie est un écran de fumée

Extreme take IMO but valid critique of the some of the polemic around CRA audits and reflects the tensions between the more and less secular:

Lors de l’annonce du poste de représentant canadien à la lutte contre l’islamophobie, nous avons été nombreux à souligner l’utilisation abusive et militante de ce terme qui confond dans son usage le respect de la personne de conviction musulmane avec le respect absolu des préceptes de l’islam.

Le dernier sondage Angus Reid illustre bien notre propos en reconduisant une telle confusion. Selon ce sondage, les Québécois auraient une opinion plus négative de l’islam que la moyenne canadienne et seraient davantage favorables à la loi 21.

On le sait, le Québec a une vision plus négative que le reste du Canada de toutes les religions et une plus grande aspiration à la laïcité. Cela découle de son parcours historique et de son attachement à un modèle de vivre ensemble basé sur des valeurs citoyennes communes. Or, la firme Angus Reid ne manque pas de conclure que les Québécois seraient plus islamophobes, au sens de racistes, que le reste du Canada. La lutte contre l’islamophobie consisterait-elle, au nom d’un antiracisme dévoyé, à inculquer une vision positive de l’islam ? Faudrait-il en faire autant pour toutes les religions ?

Ce que cache la lutte contre l’islamophobie

Plus concrètement, on vient d’apprendre que la Division de la revue et de l’examen (DRE) de l’Agence du revenu du Canada, chargée de veiller à ce que les organisations caritatives ne soient pas utilisées pour financer le terrorisme, fait l’objet d’une enquête en raison d’allégations d’islamophobie. Les plaignants font notamment valoir que 75 % des organismes dont le statut d’organisme de bienfaisance a été révoqué sont musulmans. Il appartiendra à l’Office de surveillance des activités en matière de sécurité nationale et de renseignement de trancher après enquête, mais soulignons d’emblée qu’un tel écart statistique ne présume aucunement d’une injustice.

Parmi les organisations révoquées, les médias ont déjà rapporté le cas du Centre islamique d’Ottawa pour promotion de la haine et de l’intolérance, de l’IRFAN-Canada pour financement du Hamas ou de l’ISNA pour financement de Jamaat-e-Islami, tous deux inscrits sur la liste des entités terroristes du Canada. Un simple parcours de cette liste permet d’ailleurs de constater qu’elle est constituée dans sa grande majorité de groupes islamistes. Du reste, un document sur la stratégie antiterroriste du Canada tire la même conclusion : « L’extrémisme islamique violent est la principale menace pour la sécurité nationale du Canada ».

En fait, suspendre les travaux de la DRE était l’une des recommandations du Conseil national des musulmans canadiens (CNMC) lors du sommet national sur l’islamophobie de 2021 ayant mené à la création du poste de représentant canadien à la lutte contre l’islamophobie. Parmi ses autres recommandations, le CNMC appelle le gouvernement à interrompre sa stratégie nationale de lutte contre l’extrémisme violent et la radicalisation, ainsi qu’à surveiller les organismes de sécurité nationale, dont le Service canadien du renseignement de sécurité et l’Agence des services frontaliers du Canada. Pourquoi ? Le CNMC les soupçonne de racisme, d’islamophobie et exige même une étude sur « la pénétration de la suprématie blanche » en leur sein.

Faire cesser la surveillance des organisations susceptibles de financer le terrorisme et mettre sous contrôle les organismes de sécurité nationale sous prétexte de racisme, est-ce à cela que contribuera le poste de représentant canadien à la lutte contre l’islamophobie ? Les Canadiens prennent-ils la pleine mesure de ce que tout ceci implique ?

La laïcité comme arme de diabolisation massive

À la suite du sondage Angus Reid, les médias ont relayé des propos outranciers sur la supposée « islamophobie » rampante au Québec, le CNMC allant même jusqu’à parler de danger de mort pour les musulmans.

À ce propos, Fatima Aboubakr a apporté un témoignage éclairant sur la façon dont la loi 21 était utilisée, quitte à exagérer son champ d’application, pour diaboliser le Québec et faire avancer des objectifs islamistes. Témoin de la radicalisation de jeunes de son entourage, Mme Aboubakr a participé à la fondation d’une association arabo-musulmane à vocation humaniste et laïque pour aider ces jeunes. Or, cette vocation humaniste a rapidement été mise à mal par des pressions interdisant tout propos favorable à la laïcité. Elle témoigne aussi de l’état de dépendance dans lequel se trouvent de nombreux immigrants embrigadés par des intervenants associatifs en rupture avec leur société d’accueil.

Ce n’est pas la première fois qu’un tel constat est brossé. En 2016, dans le cadre du départ d’une dizaine de jeunes du cégep Maisonneuve vers la Syrie, un rapport du Centre de prévention de la radicalisation menant à la violence faisait état d’un climat polarisant entretenu par des « agents de radicalisation » manipulant le sentiment de victimisation des jeunes en instrumentalisant le projet de Charte de la laïcité. Ces agents de radicalisation auraient considérablement contribué « à semer la haine chez les jeunes, en insistant sur le rejet collectif des musulmans et de l’islam de la part de la société québécoise ».

La lutte contre l’islamophobie est un écran de fumée permettant à des individus peu scrupuleux ou radicalisés de maintenir leurs concitoyens dans un état d’enfermement communautaire les isolant du reste du Québec, sans parler d’OBNL à vocation religieuse profitant de l’impunité qui en découle pour servir de courroie de transmission au financement du terrorisme international.

Si le gouvernement canadien doit assurément lutter contre la haine, il ne doit pas se laisser berner par l’usage volontairement confus du terme « islamophobie » au point d’entraver le bon fonctionnement des organismes de sécurité nationale. Son rôle premier est d’assurer la sécurité de ses citoyens tout en préservant sa crédibilité à l’étranger.

Source: La lutte contre l’islamophobie est un écran de fumée

Laïcité : «On n’a pas l’air d’une société décente», dit Gérard Bouchard

Worth noting:

Le sociologue Gérard Bouchard croit que le Québec « n’a pas l’air d’une société décente » avec le projet de loi sur la laïcité de l’État qui dépeint une province peu sensible aux droits fondamentaux.

De passage à Québec dans le cadre des consultations du projet de loi 21 du ministre Simon Jolin-Barrette, celui qui a cosigné en 2008 le rapport Bouchard-Taylor croit que les libéraux sont en partie responsables de la polarisation du débat en n’ayant pas agi à l’époque.

« Si [le gouvernement Charest] avait appliqué nos principales recommandations, on ne serait pas là aujourd’hui, a dit M. Bouchard. On pourrait enfin s’occuper enfin d’enjeux qui sont beaucoup plus importants. »

« Avec un enjeu aussi émotif, qui rejoint ce qui est de plus profond chez une personne, c’est évident que si le débat traîne, on va d’échec en échec, avec de l’impatience, de l’animosité, de l’agressivité, de la polarisation et des positions qui se durcissent », a poursuivi le sociologue.

Avec le projet de loi 21 du gouvernement de la Coalition avenir Québec (CAQ), qu’il qualifie de « radical » puisqu’il utilise une clause de dérogation pour le préserver de contestations judiciaires, la réputation du Québec est entachée, a dit M. Bouchard.

« On a l’air de gens qui ne sont pas très sensibles aux droits fondamentaux, a affirmé le sociologue. On a l’air d’une société pas très démocratique [en ayant] recours à la clause dérogatoire pour se soustraire à l’examen des tribunaux. On n’a pas l’air d’une société décente. »

Des conséquences sociales  

Gérard Bouchard a aussi prévenu mercredi que le gouvernement Legault risque de détériorer les relations entre la population majoritaire francophone et les communautés minoritaires du Québec.

« Les relations entre la majorité [francophone] et les minorités ne sont pas en bon état au Québec, notamment depuis la Charte des valeurs du Parti québécois. On a pu le voir encore cet été avec la controverse sur les appropriations culturelles. L’état de ces relations est mauvais et je pense que le projet de loi [caquiste] va les détériorer encore plus », a dit M. Bouchard.

Selon lui, si Québec excluait les enseignants et les directions d’école du projet de loi, pour interdire qu’aux fonctionnaires ayant un pouvoir coercitif le droit de porter un signe religieux (comme il proposait déjà en 2008), « [le gouvernement] aurait de bonnes chances de convaincre les tribunaux ».

Gérard Bouchard a aussi rappelé qu’il n’existe aucune donnée scientifique qui prouve que le port de signes religieux peut endoctriner des élèves ou les traumatiser. « Il n’y a aucune étude rigoureuse qui permet » d’appuyer cela, a-t-il dit.

Si de telles études existaient, M. Bouchard pourrait même être favorable au projet de loi du gouvernement de la Coalition avenir Québec (CAQ), a-t-il ajouté mercredi.

Source: Laïcité : «On n’a pas l’air d’une société décente», dit Gérard Bouchard

And some teacher testimony in favour of Bill 21:

Si la cigarette de Lucky Luke ou un homme-sandwich McDonald’s transmettent des messages, les signes religieux le font aussi, ont dénoncé mercredi deux enseignantes invitées aux consultations du projet de loi 21 sur la laïcité de l’État.

Leila Bensalem, une enseignante de la Commission scolaire de Montréal (CSDM), croit que le voile que porte certaines musulmanes « n’est pas un modèle à transmettre [aux] élèves. »

De passage à Québec mercredi, Mme Bensalem était accompagnée de Nadia El-Mabrouk, professeure en informatique à l’Université de Montréal. Les deux femmes ont salué la volonté du gouvernement de la Coalition avenir Québec (CAQ) d’interdire le port de signes religieux aux employés de l’État en position d’autorité, incluant les enseignants.

« Est-ce qu’il y a des données sur le fait que s’habiller en homme-sandwich McDonald’s, ça fait en sorte que les gens mangent plus de hamburgers ? L’affichage, la publicité, […] ça conditionne les personnes. Si on [en] n’était pas convaincu, […] il n’y aurait pas de publicité », a affirmé Mme El-Mabrouk.

« Les signes religieux [ont] une charge politique, a pour sa part affirmé MmeBensalem. C’est un problème dans une classe. »

Tout comme Djemila Benhabib, mardi, l’enseignante montréalaise considère qu’une enseignante musulmane voilée qui refuserait de retirer son voile, une fois la loi adoptée, serait « intégriste ».

Devant les parlementaires, elle s’est questionnée sur les états d’âme d’une petite fille iranienne dont la famille aurait fui son pays et qui se retrouverait devant une enseignante voilée. « Comment va-t-elle se sentir? », s’est inquiétée MmeBensalem.

« [Et] des élèves palestiniens […] qui ont fui les pratiques de l’État israélien [et] qui feraient face dans une classe à un enseignant qui porte la kippa, [voilà] qui les ramène à toutes ces choses qu’ils ont fuies », a-t-elle ajouté.

Québec « cautionne l’exclusion »

Haroun Bouazzi, porte-parole de l’Association des Musulmans et des Arabes pour la laïcité au Québec, croit pour sa part que le gouvernement Legault « cautionne l’exclusion » avec le projet de loi 21.

« Un gouvernement établit avec ses lois […] ce qui est acceptable ou pas dans une société. Le message est clair ici qu’il est acceptable d’exclure des membres d’une minorité sans raison valable », a-t-il dénoncé mercredi lors de son allocution devant les parlementaires à Québec.

M. Bouazzi a mis au défi le ministre Simon Jolin-Barrette de ne pas appliquer une clause dérogatoire à sa loi et de la laisser être contestée devant les tribunaux.

Plus tard en journée, mercredi, le sociologue Gérard Bouchard témoignera à son tour aux consultations particulières du projet de loi 21. Mardi, son ancien collègue, le philosophe Charles Taylor, a affirmé que le gouvernement Legault semait actuellement la division.

Source: Les signes religieux portent un message, disent des enseignantes