Les délais pour le Certificat de sélection du Québec humanitaire explosent

Nice to see a rare critical article on the Quebec’s government handling of an immigration program rather than the almost reflexive but sometimes warranted blaming the feds:

Le gouvernement Legault accuse des retards sans précédent dans la délivrance du Certificat de sélection du Québec (CSQ) pour des immigrants que le Canada a pourtant acceptés comme résidents permanents pour motifs humanitaires. Alors que ce n’était qu’une formalité de quelques semaines, il faut maintenant près d’un an pour obtenir ce précieux sésame, qui donne accès à d’importants services, dont l’assurance maladie du Québec.

« C’est une situation dramatique », dit l’avocate Anne-Cécile Raphaël. « C’est un document court et simple. Il n’y a pas de difficultés à le produire. »

Me Raphaël a plusieurs clients ayant été acceptés comme résidents permanents pour des raisons humanitaires, mais qui attendent depuis des mois d’avoir le CSQ. « J’ai des clients dont la demande a été déposée en juillet-août [2021] et qui n’ont toujours pas leur CSQ, dit-elle. J’ai une cliente qui a un dossier complet et dont le CSQ est la dernière pièce manquante. D’ailleurs, pour l’écrasante majorité des cas, il n’y a que ça qui manque. »

Le Devoir a pu constater que de nombreux avocats ont des clients dont la demande de CSQ, déposée à l’été dernier, n’a effectivement toujours pas été traitée. Certains rapportent même que ces personnes ont carrément abandonné l’idée de vivre au Québec pour aller dans une autre province. « J’ai même une famille du Nigeria qui a déménagé en Ontario en raison des longs délais pour avoir le CSQ », a indiqué l’avocate Nataliya Dzera.

Ancien président de l’Association québécoise des avocats et avocates en immigration, Guillaume Cliche-Rivard, remarque que le problème des délais semble uniquement se poser pour les personnes ayant fait une demande de résidence pour des « considérations d’ordre humanitaire ». « Ce n’est pas aussi long pour le refuge ou la réunification familiale. C’est dans l’humanitaire que les délais explosent », soutient l’avocat qui s’apprête à briguer les suffrages pour Québec solidaire dans Saint-Henri–Sainte-Anne, à Montréal.

« Je ne comprends pas pourquoi le gouvernement tarde à donner le CSQ. Ce sont tous des gens qui sont ici et qui ont fait l’objet d’une décision positive d’IRCC [Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada]. Ils ont des circonstances personnelles assez dramatiques qui ont justifié ces demandes humanitaires. »

Privés de RAMQ

Le gouvernement fédéral a le pouvoir d’accorder une résidence permanente pour considérations d’ordre humanitaire à quelqu’un qui fait la démonstration d’une bonne intégration et qui remplit certains critères justifiant les exemptions demandées. Pour une personne désirant s’installer au Québec s’ajoute l’étape du CSQ qui, il n’y a pas si longtemps, s’obtenait facilement et rapidement, soit en deux ou trois mois, selon les observations des avocats. « Quand le formulaire est rempli et que toutes les informations sont là, c’est un simple document à délivrer. C’est un taux d’approbation de plus de 95 % », a observé Me Cliche-Rivard.

Toutefois, tant que le CSQ n’est pas reçu, il n’est pas possible d’avoir accès à la RAMQ, ni aux mêmes droits de scolarité que les résidents permanents et les citoyens canadiens. Sans le CSQ, il n’est pas non plus possible pour un demandeur de conclure son dossier de résidence permanente afin, ensuite, d’entamer les démarches pour parrainer ses enfants qui seraient demeurés dans le pays d’origine. Cette lenteur, qui nuit au dossier de leurs clients, indigne plusieurs avocats en immigration.

« Je m’occupe d’une veuve originaire de l’Europe de l’Est, dont [la demande pour motifs] humanitaires avait été acceptée à la suite d’une bataille en cour fédérale. Cette fois-ci, elle doit attendre presque un an pour être admissible à la carte RAMQ », raconte Me Dzera, en laissant entendre que sa cliente est âgée et pourrait avoir besoin de soins.

Après avoir obtenu une réponse positive à sa demande de résidence permanente pour motifs humanitaires, Diana, qui ne donne pas son vrai nom par crainte de représailles, a ensuite attendu près de 8 mois avant d’avoir son CSQ et 11 mois pour avoir sa RAMQ et sa résidence permanente. « J’ai eu de graves problèmes de santé et je n’avais pas ma carte [d’assurance maladie]. Mes visites à l’hôpital coûtaient très cher », raconte cette Haïtienne d’origine, mère de six enfants. « Je n’allais pas bien. J’étais en dépression. »

Diana avait aussi le projet de faire venir au Québec sa fille aînée, qui avait alors 21 ans, âge limite pour parrainer un enfant, mais son CSQ est arrivé trop tard. Sa fille a eu 22 ans dans l’intervalle. « Je veux ma fille ici avec moi. C’est très triste ce qui est arrivé. On avait préparé tout son dossier pour pouvoir le déposer le plus tôt possible. »

11 mois d’attente

Le ministère de l’Immigration, de la Francisation et de l’Intégration (MIFI) ne nie pas que le délai s’est allongé et estime à 11 mois le délai actuel moyen pour le traitement des demandes de CSQ pour considération humanitaire. Cela inclut l’attente pour obtenir des documents ou renseignements manquants par le client, le cas échéant. À la mi-juin, le MIFI en était à examiner les demandes reçues à la mi-août 2021.

« Le nombre de demandes de sélection permanente [CSQ] reçues par le MIFI dans le cadre du Programme des personnes sélectionnées pour considérations humanitaires a augmenté depuis les dernières années », a indiqué le ministère pour expliquer ces délais.

« Comme une grande partie des personnes qui présentent ces demandes sont des demandeurs d’asile déboutés, le MIFI estime que l’augmentation du nombre de demandes d’asile faites au Québec influe sur le nombre de demandes pour considérations humanitaires reçues », ajoute-t-il.

Source: Les délais pour le Certificat de sélection du Québec humanitaire explosent

Des milliers de dossiers de résidence permanente dans les limbes

Interesting. From monthly data I have been looking at, does not appear to be radically different to elsewhere in Canada unless I am missing something:

Déjà stressés par des délais de traitement qui n’en finissent plus de s’allonger, des milliers d’immigrants en attente d’une résidence permanente depuis parfois plus d’un an s’inquiètent de n’avoir reçu aucun accusé de réception des autorités fédérales. Dénonçant un « manque de transparence », ces travailleurs vivant au Québec craignent maintenant que leur dossier ne soitperdu ou ne croupisse quelque part dans leur enveloppe au centre de traitement situé en Nouvelle-Écosse.

« On voudrait juste avoir la confirmation que notre dossier a été reçu et qu’il n’y a pas d’éléments manquants », explique Valentine Clary, qui réside depuis sept ans à Montréal et qui a déposé une demande de résidence permanente avec son conjoint il y a plus de 15 mois.

Ne mettant généralement pas plus de deux ou trois mois à arriver, l’accusé de réception est une preuve écrite qu’un dossier a été vérifié et qu’il contient tous les documents et les signatures exigés pour être mis dans la pile et être traité par Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada (IRCC). C’est aussi une preuve précieuse qui permet de demander une couverture à laRAMQ ou de maintenir en vigueur un Certificat de sélection du Québec (CSQ), en cas d’expiration.

Mme Clary a très peur de retourner malgré elle à la case départ. « J’ai peur de me faire renvoyer mon dossier parce qu’il manque quelque chose et de ne plus avoir aucun recours pour continuer à rester ici », explique cette Française d’origine, qui travaille dans le domaine de l’intelligence artificielle. « Ce n’est pas une question de délai. Personnellement, ça ne me dérangerait pas que le traitement prenne encore quatre ans, du moment que je sais que mon dossier va être étudié et ne me sera pas renvoyé. »

Des milliers de vies en suspens

Avec d’autres de ses compatriotes dans la même situation qu’elle, Valentine Clary administre un groupe Facebook de plus de 1500 personnes qui réclament toutes cet accusé de réception. Mais elles seraient beaucoup plus nombreuses en réalité.

Surtout originaires de pays francophones, comme la France, ces personnes, qui sont au Québec depuis plusieurs années, œuvrent comme ingénieurs, architectes ou dans d’autres professions qualifiées et ont toutes postulé à la résidence permanente par l’entremise du Programme des travailleurs qualifiés sélectionnés par le Québec.

Pour ces gens, tous ces dossiers demeurés sans réponse sont autant de projets de vie en suspens. « Ce que nous demande IRCC en ce moment, c’est de mettre nos vies sur pause », déplore Amandine Lafitte, une Française arrivée au Québec il y a six ans avec son conjoint. Le couple, qui avait prévu de se marier auprès de ses proches en 2021, a maintenant mis ce projet en veilleuse. Leur couverture de RAMQ l’est aussi. Et impossible de sortir du pays. « Mon dossier a été déposé il y a déjà 15 mois et, depuis, je n’ai aucune preuve qu’il va être traité », dit-elle, en craignant que son dossier ne lui revienne avec la mention « incomplet » après l’expiration de son CSQ.

Élodie Boonefaes estime aussi sa vie « bloquée » par ce silence radio d’IRCC. « Si, pour une démarche quelconque, on me demande de justifier que j’ai fait une demande de résidence permanente, je ne peux pas », dit-elle. Elle craint que son dossier ne lui revienne avec la mention « incomplet » après l’expiration de son CSQ, ce qui lui ferait perdre ce dernier.

Pour Louise Mazauric, une architecte qui vit depuis sept ans au Québec, le gouvernement fédéral pourrait faire preuve d’un peu plus d’égards. « J’aimerais au moins une confirmation que je suis “dans la boucle” et que je n’ai pas dépensé tout cet argent pourrien », dit la jeune femme d’origine française qui n’a pas reçu d’accusé de réception pour son dossier déposé il y a un an.

Une raison politique ?

Les membres du groupe Facebook à qui Le Devoir a parlé n’ont pourtant pas ménagé leurs efforts pour savoir où en était leur dossier : courriels et appels répétés à IRCC, demandesd’accès à l’information, appels aux cabinets des ministres de l’Immigration ou à leurs députés au provincial et au fédéral. Au mieux, certains immigrants ont obtenu un numéro « XEP », qui signifie qu’IRCC a bien reçu leurenveloppe, mais cela n’est pas une garantie que le dossier a été vérifié.

Pourquoi cette absence d’accusé de réception pour les travailleurs qualifiés sélectionnés par le Québec qui demandent la résidence permanente ? Et combien de dossiers dorment toujours dans leur enveloppe ? IRCC n’a pas répondu aux questions du Devoir dans les délais impartis.

L’Association québécoise des avocats et avocates en droit de l’immigration (AQAADI) a quant à elle fait ses propres démarches auprès des hauts fonctionnaires d’Immigration Canada, mais n’a réussi qu’à obtenir le nombre de demandes qui sont en traitement, soit 27 000. Un chiffre énorme selon David Chalk, un avocat en immigration impliqué dans l’AQAADI. « Honnêtement, j’étais si étonné de ce nombre que j’ai dû demander s’il s’agissait bel et bien de « dossiers » et non de « personnes » [visées par ces dossiers]. »

Selon lui, le gouvernement provincial de la Coalition avenir Québec ayant diminué ses quotas de 20 %, le gouvernement fédéral aurait rapidement atteint les cibles à l’été 2019 et cessé de traiter de nouveaux dossiers. « Donc tous les dossiers arrivés après juillet 2019 sont restés dans leur enveloppe et n’ont pas été traités. Les gens n’ont donc pas pu obtenir d’accusé de réception », affirme-t-il. Cette information n’a pu être corroborée auprès des deux ministères de l’Immigration, mais plusieurs membres du groupe Facebook disent avoir reçu des explications similaires de la part de leurs députés fédéraux.

La faute de la COVID-19

Le traitement aurait quelque peurepris, mais la pandémie nuirait auprocessus. La COVID-19 a toutefoisle dos large, estime Me Chalk, qui ne croit pas à cette excuse désormais donnée par IRCC pour expliquer les délais et l’absence d’accusés de réception. Les cas actifs se comptent sur les doigts d’une main en Nouvelle-Écosse, rappelle-t-il.

Il exhorte le gouvernement fédéral à s’engager à ne pas retourner les dossiers incomplets qu’il finira par ouvrir, mais demande qu’il octroie plutôt un délai pour fournir les pièces manquantes. Ainsi, les gens ne perdraient pas leur place dans la file. « Il ne faudrait pas que les gens en attente d’un accusé de réception subissent les conséquences de la lenteur du traitement en Nouvelle-Écosse »,dit-il. « Au lieu de traiter les demandes de résidence permanente venant de l’étranger, il faudrait donner la priorité à celles provenant de gens qui sont déjà au Québec. »

Source: Des milliers de dossiers de résidence permanente dans les limbes