Lisée | La liberté d’expression à géographie variable d’Elon Musk
2024/09/12 Leave a comment
Good critique of “Citizen Musk:”
Lorsque Donald Trump a remporté l’élection présidentielle de novembre 2016, Elon Musk a soutenu que c’était bien la preuve que nous vivions tous dans une simulation. Comme dans le film La matrice. Une théorie veut en effet que les ordinateurs de la fin du siècle seront assez puissants pour simuler toute l’existence humaine. On peut penser que nous sommes les produits de la simulation d’un jeu pour ado de 2124. D’un ado un peu sadique, qui, lorsqu’il se lasse de torturer des fourmis à l’aide d’une loupe et d’un rayon de soleil, modifie les paramètres de notre logiciel pour nous voir souffrir.
Plus tôt cette année, le milliardaire Musk a changé d’avis. L’élection de Donald Trump en 2024 lui apparaît désormais essentielle pour préserver la démocratie américaine.
Oui, la préserver. L’homme qui a voulu renverser la dernière élection — et qui nous avertit qu’il n’acceptera les résultats de la prochaine que s’il gagne — est le seul qui peut, selon Musk, éviter le pire. « La stratégie de Biden est très simple : 1. Obtenez autant d’illégaux dans le pays que possible. 2. Légalisez-les pour créer une majorité permanente — un État à parti unique. » Le fait que le gouvernement Biden ait pour l’essentiel fermé la frontière depuis le début de l’année ne le fait pas changer d’avis. Le raisonnement est audacieux de la part d’un immigrant ; Musk est né en Afrique du Sud.
Il avait naguère d’excellentes relations avec les démocrates, d’Obama à Biden. Leurs politiques favorables au développement des voitures électriques et leur intérêt pour SpaceX, l’entreprise de fusées de Musk, ne devaient pas être étrangers à ce flirt. Mais depuis, Joe Biden a indiqué qu’il faudrait bien s’intéresser aux relations internationales d’Elon Musk.
Son activité, disons, « diplomatique », est devenue encore plus intéressante après l’invasion de l’Ukraine. Il a offert gratuitement aux Ukrainiens l’utilisation de son réseau satellitaire Starlink, essentiel pour le guidage des drones. Mais lorsque Kiev a voulu attaquer des bateaux russes qui, d’un port de Crimée, lançaient des missiles sur le territoire, Musk a bloqué l’utilisation de Starlink. Il affirmait craindre une escalade de la guerre. L’un de ses proches a raconté depuis que Musk tenait cette information de bonne source : Vladimir Poutine. Si les drones ukrainiens étaient ainsi utilisés en Crimée, lui aurait-il dit, une bombe atomique serait si vite arrivée. La Crimée a été plusieurs fois attaquée depuis. On attend toujours la première bombe A.
Si vous êtes comme moi abonné à son fil X, vous aurez remarqué que ses propres messages, très fréquents, apparaissent invariablement au sommet de votre page. C’est que Musk a modifié ses algorithmes pour être toujours la première chose que vous voyez. Liberté d’expression bien ordonnée commence par soi-même. On a pu le voir récemment relayer une photo truquée d’une Kamala Harris vêtue de rouge avec une casquette à la mode de Mao, annonçant qu’elle allait être une dictatrice communiste.
C’est savoureux, car Elon Musk est pris d’une totale timidité quand vient le temps de critiquer la Chine, le deuxième marché mondial pour ses voitures Tesla. Il exploite à Shanghai une méga-usine. La Chine avait interdit Twitter sur son territoire en 2009, ce dont Musk ne parle jamais, alors qu’il tempête chaque fois qu’un autre pays veut baliser ses activités. Il s’agit d’une défense de la liberté à, disons, géographie variable.
Une de ses déclarations de septembre dernier a fait fureur à Pékin. Pour Musk, la situation de Taïwan est « analogue à celle d’Hawaï ou quelque chose comme ça, une partie intégrante de la Chine qui ne fait arbitrairement pas partie de la Chine ». Sa position fut moins appréciée à Taipei, où l’idée de retirer leur liberté d’expression à ses 23 millions d’habitants ne fait pas recette.
Grand partisan du leader brésilien Jair Bolsonaro, qui a donné libre accès sur son territoire à Starlink, Musk en a fait la promotion pendant la campagne qui l’opposait à Luiz Inácio Lula da Silva, puis a omis de faire bloquer par X les appels à la violence qui ont conduit à une tentative de renversement de Lula. Face à son refus de se conformer aux décisions brésiliennes sur la modération de certains comptes sur X, Musk a vu son entreprise interdite d’activité au Brésil, où elle comptait 40 millions d’usagers. Il est furieux.
Mais il ne l’est pas toujours. Ainsi, à la demande de son ami le président autoritaire de l’Inde, Narendra Modi, X bloque les comptes de centaines d’opposants au régime. Exactement comme X a bloqué, en Turquie, pendant la dernière campagne électorale, les comptes, là aussi, de centaines d’opposants au régime d’Erdoğan. Musk est récompensé : Modi a relaxé les règles d’investissement pour permettre à Tesla et à Starlink de s’installer chez lui. Erdoğan a aussi ouvert les bras à Starlink et a confié à SpaceX le lancement d’un satellite.
Ces épisodes ont mis en rogne le cofondateur de Wikipédia Jimmy Wales, qui a écrit sur X : « Si Elon pense maintenant : “Nous ne nous soucions pas de la liberté d’expression si elle interfère avec le fait de gagner de l’argent”, alors il devrait simplement l’avouer. »
La semaine dernière, Trump a annoncé que, s’il était réélu, Elon Musk aurait le mandat de rendre le gouvernement fédéral plus efficace. Cela promet. Lorsqu’il a acheté Twitter pour la somme colossale de 44 milliards de dollars américains, il a viré illico 75 % des salariés. Alors on attend avec impatience son plan minceur pour l’État américain.
Source: Chronique | La liberté d’expression à géographie variable d’Elon Musk
Computer translation:
When Donald Trump won the November 2016 presidential election, Elon Musk argued that it was proof that we were all living in a simulation. Like in the movie The Matrix. One theory is that computers at the end of the century will be powerful enough to simulate all human existence. We can think that we are the products of the simulation of a 2124 teen game. Of a slightly sadistic teenager, who, when he gets tired of torturing ants with a magnifying glass and a ray of sunshine, changes the settings of our software to see us suffer.
Earlier this year, billionaire Musk changed his mind. Donald Trump’s election in 2024 now seems essential to him to preserve American democracy.
Yes, preserve it. The man who wanted to overturn the last election – and who warns us that he will only accept the results of the next one if he wins – is the only one who can, according to Musk, avoid the worst. “Biden’s strategy is very simple: 1. Get as many illegals in the country as possible. 2. Legalize them to create a permanent majority – a one-party state. The fact that the Biden government has essentially closed the border since the beginning of the year does not make him change his mind. The reasoning is bold on the part of an immigrant; Musk was born in South Africa.
He once had excellent relations with the Democrats, from Obama to Biden. Their policies in favor of the development of electric cars and their interest in SpaceX, Musk’s rocket company, should not be unrelated to this flirtation. But since then, Joe Biden has indicated that we should be interested in Elon Musk’s international relations.
His activity, let’s say, “diplomatic”, became even more interesting after the invasion of Ukraine. He offered Ukrainians free of charge the use of his Starlink satellite network, essential for drone guidance. But when Kiev wanted to attack Russian ships that, from a Crimean port, launched missiles on the territory, Musk blocked the use of Starlink. He claimed to fear an escalation of war. One of his relatives has said since that Musk held this information as a good source: Vladimir Putin. If Ukrainian drones were used in this way in Crimea, he would have told him, an atomic bomb would have arrived so quickly. Crimea has been attacked several times since then. We are still waiting for the first bomb A.
If you are like me subscribed to his X-feed, you will have noticed that his own very frequent messages invariably appear at the top of your page. It’s because Musk has modified his algorithms to always be the first thing you see. Freedom of well-ordered expression begins with oneself. We could see him recently relay a rigged photo of a Kamala Harris dressed in red with a Mao-style cap, announcing that she was going to be a communist dictator.
It’s tasty, because Elon Musk is taken by total shyness when it comes time to criticize China, the world’s second market for his Tesla cars. He operates a mega-factory in Shanghai. China banned Twitter on its territory in 2009, which Musk never talks about, while it storms every time another country wants to mark its activities. It is a defense of freedom with, let’s say, variable geography.
One of his statements last September was all the rage in Beijing. For Musk, Taiwan’s situation is “similar to that of Hawaii or something like that, an integral part of China that is arbitrarily not part of China”. His position was less appreciated in Taipei, where the idea of removing their freedom of expression from its 23 million inhabitants is not a recipe.
A big supporter of Brazilian leader Jair Bolsonaro, who gave free access to Starlink on his territory, Musk promoted it during the campaign that opposed him to Luiz Inácio Lula da Silva, then failed to block by X the calls for violence that led to an attempt to overthrow Lula. Faced with his refusal to comply with Brazilian decisions on the moderation of certain accounts on X, Musk saw his company banned from activity in Brazil, where it had 40 million users. He is furious.
But he is not always. Thus, at the request of his friend the authoritarian president of India, Narendra Modi, X blocks the accounts of hundreds of opponents of the regime. Exactly as X blocked, in Turkey, during the last election campaign, the accounts, here too, of hundreds of opponents of the Erdoğan regime. Musk is rewarded: Modi has relaxed the investment rules to allow Tesla and Starlink to settle in his home. Erdoğan also opened his arms to Starlink and entrusted SpaceX with the launch of a satellite.
These episodes made Wikipedia co-founder Jimmy Wales angry, who wrote on X: “If Elon now thinks: “We don’t care about freedom of expression if it interferes with making money,” then he should simply admit it. ”
Last week, Trump announced that if re-elected, Elon Musk would have a mandate to make the federal government more effective. It promises. When he bought Twitter for the colossal sum of US$44 billion, he fired 75% of employees. So we look forward to his slimming plan for the American state.
