Le français sera-t-il bientôt une langue parmi d’autres en Ontario ?
2022/08/20 Leave a comment
Likely given immigration patterns:
Les derniers chiffres du recensement 2021 ont de quoi faire craindre la minorisation accentuée de la communauté francophone en Ontario. Bien que le nombre de francophones demeure relativement stable, la proportion de francophones (Première langue officielle parlée), par rapport à la population générale, ne fait que baisser, passant de 3,8 % en 2016 à 3,4 % en 2021 — ce qui représente la plus forte baisse depuis 2001.
À cet effet, déjà, plusieurs signes montrent une reconfiguration du régime linguistique canadien. Pendant que l’on tergiverse encore sur les nécessités du renforcement du français au sein de la Loi sur les langues officielles, aucune politique conséquente n’est mise en place en immigration.
On peine toujours autant à délivrer les visas aux étudiants francophones intéressés à venir séjourner au pays. Aucune mesure musclée ne vient encadrer et promouvoir l’immigration francophone à l’extérieur du Québec. Aucun plan n’est réalisé pour attirer ces derniers, comme en témoignent les statistiques sur la provenance des nouveaux immigrants (2016-2021).
Le dernier recensement nous apprend que 80,6 % des immigrants « choisissent » l’anglais comme première langue officielle parlée. Mais jusqu’à quel point ce choix n’est-il pas prévisible lorsqu’on constate qu’aucun effort n’a été consenti par le gouvernement pour atteindre le quart du seuil minimal d’immigration francophone internationale souhaité par la Fédération des communautés francophones et acadienne du Canada (FCFA) et plusieurs autres acteurs du monde francophone au Canada ? Cette baisse importante du prorata de francophones par rapport à la population générale en Ontario doit être analysée pour ce qu’elle est : le résultat d’une politique ratée des instances fédérale et provinciale.
Si le recensement montre bien que les francophones vieillissent et que c’est là un des facteurs explicatifs de la baisse de leur poids démographique au Canada, cette tendance n’est pourtant pas nouvelle. Elle est observable depuis des décennies, et le plan du ministre Dion (2003) cherchait déjà à en contrer les effets.
Malheureusement, les dernières données montrent au contraire que l’attractivité du français est en perte de vitesse partout au Canada. Là où cette langue est minoritaire, le français tend de plus en plus à n’être perçu que comme une langue de communication, un outil, et de moins en moins comme un vecteur culturel, en Ontario notamment.
S’il fallait encore s’en convaincre, on peut percevoir dans les résultats de ce recensement la sortie du régime de dualité linguistique traditionnelle (anglais-français) et l’entrée de plain-pied dans un régime pluraliste où le français (hors Québec) semble de plus en plus qu’une langue parmi d’autres.
Seulement 1,3 % des ménages ontariens parlent régulièrement le français à la maison ; seulement 1,9 % parlent le français et l’anglais à égalité. Et 0,1 % des ménages parlent régulièrement le français et une langue tierce, contre 18,8 % l’anglais et une langue tierce. Un lent mais profond glissement s’opère du français vers l’anglais et les langues tierces (qui représentent désormais 8 % des langues parlées régulièrement au foyer).
La langue française et ses cultures francophones semblent ainsi de plus en plus déliées l’une de l’autre et ont de plus en plus de mal à s’incarner dans des milieux concrets. Cela a pour effet de fragiliser la transmission du français et la force de ses institutions francophones, notamment scolaires (de la petite enfance à l’Université). Faut-il rappeler le saccage du fait français à l’Université Laurentienne ?
Ces statistiques ne reflètent-elles pas la place véritable que l’on souhaite donner au français dans l’espace canadien ? Une place malheureusement de plus en plus symbolique qui témoigne, d’une part, des exigences d’un marché du travail anglo-dominant et, de l’autre, du manque de volonté politique du gouvernement fédéral à assurer la pérennité et le développement des communautés francophones au pays. Le temps est désormais aux solutions audacieuses.
Source: Le français sera-t-il bienitôt une langue parmi d’autres en Ontario ?