Décision rendue fin juillet | Une première peine adaptée aux criminels racisés au Québec
2025/08/07 Leave a comment
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Dans une décision récente rendue fin juillet au palais de justice de Longueuil, la juge Magali Lepage a condamné l’accusé Frank Paris à 24 mois de prison dans une affaire de trafic de cannabis et de haschich. Ce dernier avait déjà plaidé coupable. Jusqu’ici, rien d’inhabituel.
Or, pour déterminer sa peine, la juge a considéré la jurisprudence, une analyse de la preuve, une balance des facteurs aggravants et atténuants… mais aussi une évaluation de l’impact de l’origine ethnique ou culturelle (EIOEC), une analyse particulière qui se penche sur le parcours personnel d’un criminel à travers la loupe des barrières systémiques auxquelles il a pu faire face.
Après la lecture de l’évaluation, la juge a décidé d’accepter la suggestion de la défense, presque un an plus courte que celle de la poursuite.
Il s’agit d’une première au Québec. Aucun juge québécois n’avait considéré une EIOEC dans la détermination d’une peine jusqu’au 28 juillet dernier. La décision risque donc de faire jurisprudence dans le contexte québécois. De telles procédures existent depuis 2014, ailleurs au Canada.
Qu’est-ce qu’une EIOEC ?
Une EIOEC est un rapport présentenciel d’experts qui est utilisé pour déterminer la peine d’une personne racisée – mais qui est surtout utilisé pour les personnes noires. Elle est donc déposée après qu’un accusé est reconnu coupable, mais avant que la peine soit déterminée.
Le rapport fait un examen exhaustif du parcours de l’accusé, avec une insistance sur les « réalités propres » aux personnes racisées, à la « discrimination systémique » qu’elles ont vécue et aux défis spécifiques auxquels elles sont plus exposées (plus bas taux de diplomation, plus grande proportion de familles monoparentales et de père absent, plus grand risque de vivre dans des quartiers défavorisés et criminalisés, etc.).
On considère que ces facteurs, plus présents chez les Noirs, mènent plus facilement à la criminalité.
Comme l’explique Me Valérie Black St-Laurent, avocate et directrice des opérations chez Jurigo, « l’objectif d’une EIOEC, c’est vraiment d’informer la Cour pour contextualiser le parcours de la personne qui se trouve devant elle et pour qu’elle puisse rendre une peine qui est juste » et individualisée, comme le prévoit le Code criminel.
« C’est individualisé, mais il reste que les statistiques montrent que tout le groupe des personnes noires est victime de discrimination », renchérit Karine Millaire, professeure adjointe à la faculté de droit de l’Université de Montréal.
« Il faut tenir compte du fait qu’il y a une surincarcération des personnes noires qui est issue du fait que notre système est aussi discriminatoire », dit-elle….
Source: Décision rendue fin juillet | Une première peine adaptée aux criminels racisés au Québec
In a recent decision delivered at the end of July at the Longueuil courthouse, Judge Magali Lepage sentenced the accused Frank Paris to 24 months in prison in a cannabis and hashish trafficking case. The latter had already pleaded guilty. So far, nothing unusual.
However, to determine her sentence, the judge considered the case law, an analysis of the evidence, a balance of aggravating and mitigating factors… but also an assessment of the impact of ethnic or cultural origin (EIOEC), a particular analysis that looks at the personal journey of a criminal through the magnifying glass of the systemic barriers he was able to face.
After reading the evaluation, the judge decided to accept the suggestion of the defense, almost a year shorter than that of the prosecution.
This is a first in Quebec. No Quebec judge had considered an EIOEC in determining a sentence until July 28. The decision is therefore likely to become jurisprudence in the Quebec context. Such procedures have existed since 2014, elsewhere in Canada.
What is an EIOEC?
An EIOEC is a face-to-face expert report that is used to determine the sentence of a racialized person – but is mainly used for black people. It is therefore filed after an accused is found guilty, but before the sentence is determined.
The report makes an exhaustive examination of the accused’s career, with an emphasis on the “realities specific” of racialized people, the “systemic discrimination” they have experienced and the specific challenges to which they are more exposed (lower graduation rates, greater proportion of single-parent families and absent fathers, higher risk of living in disadvantaged and criminalized neighborhoods, etc.).
These factors, more present among blacks, are considered to lead more easily to crime.
As explained by Valérie Black St-Laurent, lawyer and director of operations at Jurigo, “the objective of an EIOEC is really to inform the Court to contextualize the journey of the person who is in front of it and so that he can render a sentence that is fair” and individualized, as provided for by the Criminal Code.
“It’s individualized, but the statistics still show that the entire group of black people is a victim of discrimination,” adds Karine Millaire, assistant professor at the Faculty of Law at the University of Montreal.
“We must take into account the fact that there is an over-imprisonment of black people that results from the fact that our system is also discriminatory,” she says….
Patrick Lagacé’s biting critique of the EIOEC reasoning the judgement relied on:
La suite du paragraphe est hallucinante de déresponsabilisation : « Bien que M. Paris ait cru qu’il servait sa communauté d’une façon positive en donnant une tribune aux artistes et l’accès à l’internet, il y vendait aussi des substances illicites. En rétrospective, M. Paris croit qu’il aurait dû cesser de vendre de la cocaïne à cette époque… »
Et c’est comme ça sur 44 pages, cette « évaluation de l’incidence de l’origine ethnique et culturelle », j’en passe et des meilleures : tout est la faute de la société, rien n’a jamais été, rien n’est et ne sera jamais la faute de Frank Paris.
S’il commet des crimes, si la récidive lui tombe dessus à répétition, c’est parce qu’il est noir dans une société anti-black. Et handicapé, mais ça me prendrait une autre chronique pour vous expliquer cette intersectionnalité fascinante qui pousse aussi M. Paris à la criminalité.
Bref, je ne sais pas si les « évaluations de l’incidence de l’origine ethnique et culturelle » nées en Nouvelle-Écosse sont toujours de la bullshit, mais celle de M. Frank Paris, la première utilisée par une juge au Québec, m’apparaît comme ça et juste ça : de la bullshitpur jus.
Source: Un rapport vaguement ésotérique
The rest of the paragraph is hallucinating with deresponsibility: “Although Mr. Paris believed that he served his community in a positive way by giving a forum to artists and access to the Internet, he also sold illicit substances there. In retrospect, Mr. Paris believes that he should have stopped selling cocaine at that time…”
And that’s how it is on 44 pages, this “assessment of the impact of ethnic and cultural origin”, I pass and the best: everything is the fault of society, nothing has ever been, nothing is and will never be the fault of Frank Paris.
If he commits crimes, if recidivism falls on him repeatedly, it is because he is black in an anti-black society. And disabled, but it would take me another column to explain this fascinating intersectionality that also pushes Mr. Paris to crime.
In short, I don’t know if the “evaluations of the incidence of ethnic and cultural origin” born in Nova Scotia are still bullshit, but that of Mr. Frank Paris, the first used by a judge in Quebec, appears to me like this and just that: bullshitpur jus.
