Idées | 2024, une année centrale pour la laïcité de l’État
2025/01/03 Leave a comment
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Plusieurs étapes ont été franchies au cours des ans pour une laïcité de l’État au Québec. On n’a qu’à penser à la création du ministère de l’Éducation lors de la Révolution tranquille, à la déconfessionnalisation des Commissions scolaires en 2000, ou encore à la Loi sur la laïcité de l’État (Loi 21) en 2019. Cette grande épopée n’est pas encore arrivée à terme. Voici, en rappel, quelques événements survenus en 2024.
5 février 2024. Le Bloc québécois dépose un deuxième projet de loi pour éliminer l’exception religieuse du Code criminel canadien, lorsqu’il s’agit de propagande haineuse (C-373). Le 14 juin dernier, ce projet de loi a été ajouté à l’ordre de priorité du gouvernement, mais il est toujours en attente d’une date pour être considéré en deuxième lecture.
29 février 2024. La Cour d’appel du Québec confirme la constitutionnalité de la Loi 21 et rejette ainsi le jugement de la Cour supérieure qui en avait exempté les Commissions scolaires anglophones.21 mars 2024. La Cour supérieure autorise Droits Collectifs Québec et le Mouvement laïque québécois (MLQ) à intenter un recours en justice (via un mandamus) contre le Conseil de la magistrature du Québec pour lui enjoindre d’établir des règles traduisant les exigences de la laïcité de l’État auprès des juges. Cette cause est importante car elle concerne le droit de toute personne vivant au Québec de bénéficier d’institutions judiciaires laïques.
26 avril. Le gouvernement fédéral crée tout un émoi au Québec en indiquant, dans son budget 2024, explorer de nouvelles mesures pour élargir l’accès aux prêts hypothécaires islamiques. La Coalition avenir Québec, le Parti québécois, le Bloc québécois à Ottawa et des organisations civiles, dont le Rassemblement pour la Laïcité (RPL) montent aux créneaux pour s’opposer à cette initiative contraire aux principes de la laïcité de l’État.29 avril. La décision de la Fédération autonome de l’enseignement (FAE) d’amener la Loi 21 devant la Cour suprême est vivement critiquée par des enseignants qui s’opposent à ce que leurs cotisations syndicales servent à financer ce recours juridique et réclament une véritable consultation sur cette démarche.
19 juin. L’arrondissement d’Ahuntsic-Cartierville autorise un groupe religieux à organiser une prière collective musulmane dans un parc, en contradiction avec son règlement qui y interdit toute cérémonie religieuse. Cette décision crée des remous puisque l’événement, réservé aux adeptes de cette religion tout en reléguant femmes et fillettes dans un espace cloisonné loin derrière les hommes, prive les citoyens de leur espace public.
9 juillet. À la demande du gouvernement du Québec et du MLQ, le juge Mahmud Jamal de la Cour suprême se retire du dossier sur la Loi 21.Juillet. Le choix de la Ville de Montréal d’inclure une femme voilée sur le panneau de bienvenue de son hall d’entrée crée polémique. Selon le MLQ et Pour les droits des femmes du Québec, cette affiche porte atteinte à la laïcité de l’État et au droit des femmes à l’égalité. La mairesse Valérie Plante annoncera, en octobre, que cette affiche sera retirée en raison du « malaise » qu’elle suscite, mais essentiellement pour réitérer que le Québec est une société laïque.
Septembre. Les manuels du nouveau programme Culture et citoyenneté québécoise, qui devaient faire la « promotion de l’État de droit laïque » dans nos écoles, comportent de sérieuses lacunes. Ils contiennent des définitions et principes de la laïcité qui ne reflètent pas les principes de la Loi 21 et ils ne s’appuient pas sur les considérants de la loi pour expliquer ses motifs.22 octobre. À la suite de la publication du rapport de l’école Bedford, le premier ministre Legault confie aux ministres Drainville et Roberge le mandat de trouver des moyens de renforcer les contrôles et la laïcité dans les écoles du Québec. Ce rapport faisait état de plaintes et de signalements concernant des enjeux liés au non-respect d’obligations en matière de laïcité. Le PM a aussi mentionné être disposé à débattre de bonne foi de l’abolition du financement des écoles privées religieuses quoique ce ne soit pas sa priorité. Quelques jours plus tard, les ministres amorcent des vérifications dans 17 écoles du Québec.
27 novembre. Le Comité consultatif sur les enjeux constitutionnels du Québec au sein de la fédération canadienne recommande de doter le Québec d’une constitution codifiée qui inclurait les lois fondamentales actuellement en vigueur, dont la Loi 21.29 novembre. Le gouvernement du Québec demande au fédéral la fin de l’exemption religieuse inscrite au code criminel concernant la propagande haineuse, demande aussitôt appuyée par RPL et le Centre consultatif des relations juives et israéliennes (CIJA). Comme le dit si bien la philosophe Louise Mailloux : « cette immunité accordée aux croyants est une aberration et rien ne peut justifier que ceux-ci puissent jouir d’un pareil privilège au détriment de tous les autres citoyens ».
6 décembre. Le premier ministre Legault dit songer à légiférer pour interdire la prière dans l’espace public et à un projet de constitution pour inscrire la laïcité, l’égalité entre les femmes et les hommes et l’intégration des immigrants en toutes lettres dans un texte fondamental.
Il n’y a pas à dire, l’année 2025 s’annonce fructueuse en discussion quant à la laïcité de l’État.Marie-Claude Girard L’autrice est retraitée de la Commission canadienne des droits de la personne. Elle signe ce texte à titre personnel.
Source: Idées | 2024, une année centrale pour la laïcité de l’État
Several steps have been taken over the years for a secularism of the state in Quebec. We only have to think of the creation of the Ministry of Education during the Quiet Revolution, the deconfessionalization of School Boards in 2000, or the Law on the Secularism of the State (Law 21) in 2019. This great epic has not yet come to an end. Here are, as a reminder, some events that occurred in 2024.
February 5, 2024. The Bloc Québécois is filing a second bill to eliminate the religious exception of the Canadian Criminal Code when it comes to hate propaganda (C-373). On June 14, this bill was added to the government’s order of priority, but it is still waiting for a date to be considered in second reading.
February 29, 2024. The Quebec Court of Appeal confirms the constitutionality of Bill 21 and thus rejects the ruling of the Superior Court, which had exempted the English-speaking School Commissions.
March 21, 2024. The Superior Court authorizes Droits Collectifs Québec and the Mouvement laïque québécois (MLQ) to bring an action (via a mandamus) against the Conseil de la magistrature du Québec to order it to establish rules reflecting the requirements of the secularism of the State with judges. This cause is important because it concerns the right of any person living in Quebec to benefit from secular judicial institutions.
April 26. The federal government is creating a stir in Quebec by indicating, in its 2024 budget, to explore new measures to expand access to Islamic mortgages. The Coalition avenir Québec, the Parti québécois, the Bloc québécois à Ottawa and civil organizations, including the Rassemblement pour la Laïcité (RPL), are stepping up to oppose this initiative contrary to the principles of state secularism.
April 29. The decision of the Fédération autonome de l’enseignement (FAE) to bring Bill 21 before the Supreme Court is strongly criticized by teachers who oppose their union dues being used to finance this legal recourse and call for a real consultation on this approach.
June 19. The borough of Ahuntsic-Cartierville authorizes a religious group to organize a collective Muslim prayer in a park, in contradiction with its regulations that prohibit any religious ceremony. This decision creates a stir since the event, reserved for followers of this religion while relegating women and girls to a compartmentalized space far behind men, depriving citizens of their public space.
July 9th. At the request of the Government of Quebec and the MLQ, Justice Mahmud Jamal of the Supreme Court withdrew from the Bill 21 file.
July. The City of Montreal’s choice to include a veiled woman on the welcome sign in its entrance hall creates controversy. According to the MLQ and Pour les droits des femmes du Québec, this poster violates the secularism of the state and the right of women to equality. Mayor Valérie Plante will announce in October that this poster will be removed because of the “unease” it causes, but mainly to reiterate that Quebec is a secular society.
September. The manuals of the new Quebec Culture and Citizenship program, which were supposed to “promote the secular rule of law” in our schools, have serious shortcomings. They contain definitions and principles of secularism that do not reflect the principles of Bill 21 and they do not rely on the recitals of the Act to explain its reasons.
October 22. Following the publication of the Bedford School report, Prime Minister Legault entrusted Ministers Drainville and Roberge with the mandate to find ways to strengthen controls and secularism in Quebec schools. This report reported on complaints and reports regarding issues related to non-compliance with secular obligations. The PM also mentioned that he was willing to debate in good faith the abolition of the funding of private religious schools whatever was not his priority. A few days later, the ministers began checks in 17 schools in Quebec.
November 27. The Advisory Committee on the Constitutional Issues of Quebec within the Canadian Federation recommends that Quebec be given a codified constitution that would include the fundamental laws currently in force, including Bill 21.
November 29. The government of Quebec asks the federal government to end the religious exemption inscribed in the criminal code concerning hate propaganda, immediately supported by RPL and the Advisory Center for Jewish and Israeli Relations (CIJA). As the philosopher Louise Mailloux says so well: “this immunity granted to believers is an aberration and nothing can justify that they can enjoy such a privilege at the expense of all other citizens”.
December 6th. Prime Minister Legault said he was thinking of legislating to prohibit prayer in public space and a draft constitution to include secularism, equality between women and men and the integration of immigrants in full in a fundamental text.
There is no need to say, the year 2025 promises to be fruitful in discussion about the secularism of the State.
Marie-Claude Girard The author is retired from the Canadian Commission on Human Rights. She signs this text in a personal capacity.
