Un premier observatoire sur l’immigration francophone au Canada

Small change compared to the CERC grant of close to $100 million…

Le premier observatoire en immigration francophone au Canada a été inauguré mercredi. Examinant un sujet souvent politisé, l’organisme cherchera à favoriser le développement de connaissances et à « avoir une portée sur le milieu gouvernemental, communautaire et universitaire ».

L’observatoire « contribuera aux efforts menés par le Canada pour favoriser l’accueil et l’intégration des immigrants francophones », a déclaré par voie de communiqué le ministre canadien de l’Immigration, Marc Miller, soulignant que « l’immigration francophone joue un rôle clé pour soutenir la vitalité et la croissance des communautés francophones hors Québec ».

M. Miller a également annoncé un investissement de près de 85 000 $ auprès de l’Université de l’Ontario français (UOF) pour la « mise en place » de cet observatoire, dont la cérémonie d’inauguration a eu lieu en fin d’après-midi au Centre francophone de Toronto.

« Là, on a un financement d’Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada [IRCC] pour le démarrage. On espère que le financement va se poursuivre au fil des ans pour pouvoir assurer la viabilité de cette initiative », indiquait plus tôt au Devoir la professeure de l’UOF qui a mené le projet, Linda Cardinal.

Dans les 20 dernières années, plusieurs initiatives de recherche s’intéressant à l’immigration francophone se sont essoufflées par manque de financement ou de structure institutionnelle, explique-t-elle.

Les membres de l’Observatoire en immigration francophone sont encore en train d’en « confirmer » les objectifs, mais l’organisme compte notamment organiser des ateliers éducatifs, ainsi que produire et « mettre en valeur » des données, explique Mme Cardinal.

Une première activité aura lieu dès jeudi, se réjouit-elle. Il s’agit d’une « école d’automne », au cours de laquelle 25 doctorants, professeurs, représentants de groupes communautaires et fonctionnaires seront « initiés à la statistique linguistique, en particulier en matière d’immigration ». Des recherches porteront également sur la perception qu’ont les immigrants de la francophonie au Canada, ainsi que sur la « notion d’accueil ».

« Politisation » de l’immigration

L’observatoire espère aussi participer aux discussions sur la mise en oeuvre de la nouvelle politique en immigration francophone d’Ottawa. Depuis la réforme de la Loi sur les langues officielles, IRCC doit « adopter une politique en matière d’immigration francophone visant à favoriser l’épanouissement des minorités francophones au Canada, notamment en assurant le rétablissement et l’accroissement de leur poids démographique ».

C’est dans cette lignée qu’ont été présentées les nouvelles cibles d’immigration francophone hors Québec, qui passeront de 4,4 % actuellement à 6 % en 2024, 7 % en 2025, puis 8 % en 2026. Des taux « ambitieux », selon le ministre Miller, mais qui ne suffiront pas à « renverser le déclin de la francophonie », si l’on écoute la Fédération des communautés francophones et acadienne, qui réclame une hausse progressive commençant à 12 % en 2024 et allant jusqu’à 20 % en 2036.

Un sondage publié fin octobre indique toutefois que l’appui aux cibles d’immigration actuelles est en chute libre : 44 % des Canadiens affirment que « le Canada accueille trop d’immigrants », soit une croissance record de 17 points par rapport à 2022.

« Ces statistiques, c’est un portrait du moment. […] Ce qu’on entend, c’est des gens qui politisent la question de l’immigration parce qu’il y a des élections qui s’en viennent. Il y a des enjeux réels dans les services sociaux, en matière de logement, mais ces enjeux existaient avant les débats sur l’immigration », explique-t-elle.

Mais il n’y a « personne au Canada qui dit qu’il est contre l’immigration », ajoute-t-elle. « Un observatoire comme le nôtre pourrait contribuer [au débat] de façon à mieux faire comprendre la situation […] à distance de la politisation. »

Plusieurs consultations

Celle qui est aussi vice-rectrice adjointe à la recherche de l’établissement inauguré en 2021 affirme que, depuis sa création, l’UOF souhaitait faire de la question de l’immigration l’« un de ses créneaux d’excellence ».

Pour mener à bien le projet, Mme Cardinal a consulté des chercheurs afin de « connaître leurs priorités ». « L’idée, c’était d’héberger cette initiative à l’UOF, mais avec une portée pancanadienne », ajoute-t-elle. L’Université d’Ottawa, l’Université Simon Fraser, l’Université de Moncton et la Chaire d’excellence en recherche du Canada sur la migration et l’intégration, à l’Université métropolitaine de Toronto, sont ainsi des partenaires de l’observatoire.

« En recherche, il faut toujours travailler en collaboration pour avoir un impact et pour susciter l’adhésion — et aussi pour s’assurer qu’en francophonie canadienne, notamment, on crée une relève, soutient-elle. On responsabilise nos universités à l’importance du thème de l’immigration. Depuis les années 2000, l’immigration fait partie de la redéfinition même de ce qu’est la francophonie en contexte minoritaire. »

Les travaux de l’observatoire porteront surtout sur l’immigration francophone en contexte minoritaire. Or, le Québec sera « une base de comparaison très intéressante », indique Mme Cardinal. Et l’Ontario a aussi « des choses à dire au Québec, notamment sur la notion d’accueil. […] On espère que le Québec va s’intéresser à nous ».

Source: Un premier observatoire sur l’immigration francophone au Canada