Immigration irrégulière: Dans les cahiers secrets des passeurs

Interesting insights into cross-border people smugglers and traffickers:

L’enquête sur ce réseau de passeurs d’une ampleur inusitée au Québec a bénéficié de la collaboration étroite entre les services frontaliers du Canada et ceux des États-Unis. Ironiquement, elle pourrait connaître son dénouement alors que le président Donald Trump accuse toujours le Canada de ne pas être assez proactif en matière de sécurité frontalière.

Les carnets saisis par l’Agence des services frontaliers du Canada (ASFC) sur deux dirigeants de l’organisation à Montréal se sont avérés une mine d’information inespérée. Dans des centaines de pages de documents judiciaires déposés devant les tribunaux, les enquêteurs dressent leurs constats sur les ramifications du réseau actif dans trois pays. Selon eux :

  • L’organisation criminelle mexicaine compte une dizaine de collaborateurs connus à Montréal, dont plusieurs ont des liens familiaux ;
  • Elle organise la traversée clandestine de la frontière dans les deux sens : du Québec vers les États-Unis et vice-versa ;
  • Elle collecte entre 5000 $ et 6000 $ par passage, ce qui lui a rapporté au moins 1 million de dollars en sept mois ;
  • Elle serait aussi active dans le trafic de stupéfiants ;
  • Elle est soupçonnée d’être liée aux cartels de la drogue.

Le dossier revêt une importance particulière pour l’ASFC, qui n’a pas l’habitude de se frotter à des réseaux de passeurs aussi prolifiques.

« Je serais porté à dire que c’est le plus gros, ou celui qui semble le plus structuré. Je vais faire attention, parce qu’on est encore en train d’enquêter, mais c’est dans les plus gros qu’on a eus dans la région du Québec », affirme en entrevue Tony Dos Santos, directeur adjoint responsable des enquêtes criminelles de l’ASFC pour le Québec.

Nouvelle réalité avec la fermeture du chemin Roxham

La Presse a obtenu des copies des précieux cahiers de comptabilité, déposées en preuve au tribunal de l’immigration. Tout y était soigneusement consigné : les noms des clients ayant eu recours aux services de l’organisation, leurs numéros de téléphone, les coordonnées d’un ami ou d’un membre de leur famille qui servait de « caution », les montants payés, la date de leur passage, la liste des recruteurs sur le sol mexicain et des complices du côté américain.

“C’est rare qu’on a de la preuve comme ça ! Je vais être franc, on ne voit plus ça, en 2024, des calepins de ce genre avec des inscriptions. C’est un cas vraiment old school.”

 Tony Dos Santos, directeur adjoint responsable des enquêtes criminelles de l’ASFC pour le Québec

L’agence constate une recrudescence du recours à des groupes de passeurs organisés depuis deux ans. Autrefois, les migrants pouvaient se rendre jusqu’au chemin Roxham, traverser à pied et demander l’asile au Canada sur place. La fermeture du chemin Roxham en 2023 a changé la donne. « Maintenant, ils doivent carrément entrer de façon illégale, attendre et se cacher 14 jours au Canada avant de lever la main et de demander le statut de réfugié, sinon on les renvoie aux États-Unis », explique M. Dos Santos. Le recours aux groupes de passeurs organisés a augmenté en conséquence.

« Ce type d’organisation criminelle est impitoyable et menace souvent les consommateurs s’ils ne payent pas, ou les place dans une situation vulnérable », précise un rapport de l’ASFC déposé en preuve…

Source: Immigration irrégulière Dans les cahiers secrets des passeurs