Des demandeurs d’asile qui s’adaptent plutôt que de combattre en vain
2023/08/11 Leave a comment
Given ongoing levels of asylum claimants, some suggestions to facilitante their integration at the local level. Silent on the need for faster processing and decisions on asylum claims, however:
Le 20 juillet dernier, dans un article du Devoir (« Un nombre record de demandeurs d’asile passent désormais par les aéroports »), on apprenait que les demandeurs d’asile n’étaient pas moins nombreux à entrer au pays depuis la fermeture du chemin Roxham.
En effet, en suivant la courbe des entrées chaque mois comparativement à l’année précédente, on anticipe que le nombre de demandeurs d’asile admis en 2023 au Canada serait vraisemblablement similaire à celui de 2022. Si la frontière terrestre au sud apparaît plus imperméable, les demandeurs d’asile arrivent dorénavant en plus grand nombre par les airs.
Après quelques mois, le constat se pose donc simplement : la fermeture de chemin Roxham ne semble pas avoir eu d’effet sur le nombre de demandeurs d’asile qui entrent au Canada. Le phénomène d’arrivée des migrants qui touchaient jusqu’à récemment principalement l’Europe et les États-Unis est désormais une réalité chez nous. Si cette tendance a été longtemps ignorée, elle devient maintenant incontournable.
Pour faire face à cette question de manière pragmatique, il faut davantage s’intéresser au continuum de services d’accueil et à leur coordination, une réflexion qui tarde à se faire. Une meilleure cohérence entre les politiques publiques devrait être recherchée afin de s’assurer de l’accueil et de l’intégration de ces migrants, mais aussi de l’atteinte des objectifs nationaux chers au Québec, notamment celui de la francisation et de l’accès égal à des opportunités.
À cet égard, un écueil d’envergure est la collaboration entre les différents ordres de gouvernement. Cette coordination entre les ordres de gouvernement et les organismes qui offrent la majorité des services d’installation et d’intégration doit reposer sur une séparation claire des pouvoirs et responsabilités, un alignement des stratégies ainsi qu’un financement proportionnel au niveau d’engagement de chacune des parties prenantes.
Échelle locale
Également, et la recherche est claire à cet effet, la coordination des services voués aux nouveaux arrivants doit être menée à l’échelle locale pour être optimale. Le gouvernement du Québec, qui est responsable des services d’accueil et d’intégration en vertu de l’entente qu’il a ratifiée avec le gouvernement fédéral en 1991, doit absolument s’appuyer sur les lieux de concertation municipaux ou régionaux qui ont développé l’expertise des défis et sur les ressources disponibles sur le terrain.
Pour l’instant, Québec, qui a transféré des compétences aux villes après l’abolition des conférences régionales des élus il y a presque 10 ans, peine à reconnaître le leadership de celles-ci dans la coordination des services locaux. Ses programmes et financements devraient être alignés sur les stratégies et les priorités locales, plutôt que d’en faire fi.
Les efforts et ressources seraient ainsi mieux alloués. De même, avec la mise en place des agents d’aide à l’intégration (les AAI, comme ils sont désignés par le milieu), Québec dédouble un service existant sans que ces agents aient la capacité d’arriver à la cheville de l’expertise qui s’est développée à travers les années dans les organismes communautaires.
L’arrivée des demandeurs d’asile crée d’ailleurs une pression immense dans les communautés, ses organismes et institutions, particulièrement dans la grande région de Montréal. Ce sont largement eux qui offrent les services d’installation, de francisation, pour l’aide à l’emploi ; ils accueillent les enfants dans les écoles, logent et équipent les familles, etc.
Or, les organismes sur le terrain vous le diront : pour faire connaître leurs services, il leur est souvent impossible d’entrer en contact avec les demandeurs d’asile pris en charge par PRAIDA, le programme québécois chargé des demandeurs d’asile. Ceux-ci finissent par accéder aux services des organismes du milieu, mais pas sans embûches.
Pour s’assurer de la pleine intégration des immigrants, notamment des demandeurs d’asile, et ce, dans l’intérêt de la société québécoise, Québec doit reconnaître le rôle stratégique joué par les communautés locales et s’assurer de les outiller adéquatement.
Responsabilité mondiale
En bref, il faut entrevoir une suite aux discussions concernant l’accueil des demandeurs d’asile, et ce, à tous les ordres de gouvernement. Il n’est pas étonnant que les décideurs aient bien voulu croire (du moins en apparence) que la fermeture du chemin Roxham aurait tout réglé : l’arrivée des migrants en Europe et aux États-Unis a largement polarisé les débats politiques depuis quelques années. La réalité canadienne demeure toutefois que le nombre de demandeurs d’asile qui passent ses frontières est minime par rapport à ce qui a été observé ailleurs.
À juste titre, la ministre de l’Immigration, de la Francisation et de l’Intégration, Christine Fréchette, rappelait cet hiver que les demandeurs d’asile étaient avant tout des humains, exhortant ainsi à un peu d’humanité dans le débat public.
Les demandeurs d’asile sont admis officiellement au Canada comme réfugiés dans environ 50 % des cas après un processus administratif permettant d’évaluer leur demande. C’est donc dire que dans une large proportion, on juge qu’effectivement, leur sécurité et même leur vie sont menacées dans leur pays d’origine.
Établir ses pénates ici relève pour eux d’un exploit suivant un parcours difficile, et une chance inespérée de vivre en paix. Si ces migrants quittent leur terre natale, c’est qu’elle leur est devenue hostile pour de nombreuses raisons : groupes armés, conflits, persécution pour des motifs politiques et religieux, ainsi que les changements climatiques… Et bien sûr, les pays occidentaux ont aussi leur rôle à jouer, en amont, pour atténuer ces crises mondiales.
Source: Des demandeurs d’asile qui s’adaptent plutôt que de combattre en vain
