Montréal et Gatineau, l’immigration et les jeunes accélèrent le déclin du français, selon Québec

Ongoing concern one without easy solutions particularly for youth:

Malgré un maintien relatif de l’utilisation de la langue dans l’espace public, le déclin du français se poursuit, accéléré par l’immigration, par les habitudes de consommation des jeunes Québécois et par la situation à Montréal, indique le ministre de la Langue française, Jean-François Roberge.

« J’aimerais ça vous dire : “Oui, oui, c’est réglé !” Ce n’est pas le cas encore », a lancé l’élu caquiste à sa sortie du Salon bleu, mercredi, une petite heure après avoir déposé en chambre le plus récent Rapport sur l’évolution de la situation linguistique de l’Office québécois de la langue française (OQLF).

Rendu public tous les cinq ans, ce document fait une revue multidisciplinaire de l’usage de la langue de Molière au Québec. On y apprend notamment que le français dans l’espace public — une statistique sur laquelle s’appuyait le commissaire à la langue française, Benoît Dubreuil, dans un rapport en septembre — a très légèrement reculé entre 2007 (79,1 %) et 2022 (78,7 %).

Il y est aussi relevé que la proportion de personnes travaillant principalement en français est passée de 81,8 % en 2001 à 79,9 % 20 ans plus tard, en 2021. Sur la même période, l’anglais a progressé, passant de 12,3 % à 14 %.

Accosté par la presse parlementaire, mercredi, le ministre Roberge a tenu à rappeler qu’il « y a plusieurs indicateurs à surveiller ». « Tant mieux s’il y a des secteurs où on recule moins, où on a atteint un certain plateau, mais il reste qu’on n’a pas arrêté le déclin encore », a-t-il dit.

Trois « fractures »

L’élu caquiste a cerné « trois enjeux en particulier » dans le dossier du français. Il cite au premier chef la « fracture régionale » qui existe entre Montréal, Gatineau et le reste du Québec. Selon l’OQLF, 59,5 % des Montréalais s’exprimaient en français lorsqu’ils étaient à l’extérieur de la maison en 2022. Ce chiffre s’élevait à 63 % à Gatineau.

« On voit que Montréal et Gatineau sont des régions où il y a un écart très, très grand par rapport au reste du Québec », a soulevé M. Roberge mercredi.

Selon le rapport de l’OQLF, « la proportion de personnes parlant principalement le français à la maison a diminué dans chacune des RMR [régions métropolitaines de recensement] du Québec » de 2016 et 2021. « Cette diminution a cependant été plus prononcée sur l’île de Montréal, dans la couronne de Montréal et dans la RMR de Gatineau qu’ailleurs au Québec », peut-on lire.

« Maintenant, en ce moment, avec l’arrivée massive de travailleurs temporaires et de demandeurs d’asile, c’est sûr que ç’a un impact », a déclaré M. Roberge. Aux dernières nouvelles, plus de 560 000 immigrants non permanents résidaient au Québec, dont une part importante dans la région métropolitaine de Montréal.

Les données de l’OQLF montrent par ailleurs que tout près d’un tiers (31,6 %) des résidents non permanents ne parviennent pas à entretenir une conversation en français. « C’est une autre ligne de fracture », a lancé M. Roberge mercredi.

« Je l’ai nommé, je vais le redire encore aussi : quand on accueille 30 000, 35 000 étudiants non québécois anglophones au centre-ville de Montréal, qui après ont des emplois étudiants, ça aussi, ça contribue à angliciser les milieux de travail », a-t-il ajouté.

Beaucoup d’anglais chez les jeunes

Selon M. Roberge, la dernière « fracture » est « générationnelle ». D’après une étude de l’OQLF citée dans le rapport, 55 % des jeunes qui utilisent les réseaux sociaux affirment publier leur contenu « soit autant en français qu’en anglais, soit principalement en anglais ».

« Même parmi les jeunes francophones, la part de personnes publiant principalement en français n’était pas particulièrement élevée (52 %) », écrit l’Office.

À la période des questions à Ottawa, mercredi, le chef du Bloc québécois, Yves-François Blanchet, a reproché au premier ministre canadien, Justin Trudeau, d’« affaiblir le français », notamment chez les jeunes, avec ses politiques linguistiques. « On est préoccupés par le déclin du français qu’on voit à travers le pays, y compris au Québec », a rétorqué M. Trudeau, tout en affirmant que « ce n’est pas la minorité anglophone qui est une menace pour le français au Québec ».

Le ministre Roberge, qui a déposé le mois dernier un plan d’action visant à renverser le déclin de la langue, espère quant à lui « changer l’environnement » culturel des jeunes Québécois.

« Un jeune qui a 15, 16, 17 ans, s’il baigne dans un environnement culturel anglophone, bien il a plus de chances, évidemment, d’utiliser l’anglais au quotidien, de publier sur les réseaux sociaux en anglais, a-t-il soutenu mercredi. Quand il ouvre la télé, il n’ouvre pas la télé traditionnelle. Il va aller sur Netflix, il va aller sur Disney, il va aller sur toutes les plateformes de diffusion en continu. »

Alerté par un comité indépendant des risques pour la santé du français du manque de « découvrabilité » des contenus francophones, le gouvernement de François Legault s’est engagé, au début de l’année, à déposer un projet de loi pour forcer les plateformes numériques à mettre en avant davantage de contenus du Québec. « On va faire flèche de tout bois », avait affirmé en janvier le ministre de la Culture et des Communications, Mathieu Lacombe.

Plan d’action

Voilà deux ans presque jour pour jour que le gouvernement de la Coalition avenir Québec a adopté la loi 96. Cette vaste réforme de la loi 101 agit dans plusieurs sphères, avec pour objectif de protéger la langue française.

Le mois dernier, le ministre Roberge a rendu public le résultat des travaux du Groupe d’action pour l’avenir de la langue française. Dans son plan d’action, le gouvernement Legault s’engage à rehausser les fonds pour la francisation, à légiférer dans le domaine de la culture et à renforcer les exigences de français imposées aux nouveaux arrivants, entre autres.

« Donnons-nous le temps d’implanter nos mesures et de voir ce qu’elles vont changer. Si on doit aller plus loin, on le fera », a dit M. Roberge mercredi.

Interrogé au moment du dépôt de son plan d’action, l’élu caquiste avait refusé de se fixer un échéancier d’inversion du déclin du français. « Je pense qu’on va [l’]inverser […] très rapidement », avait-il dit.

Source: Montréal et Gatineau, l’immigration et les jeunes accélèrent le déclin du français, selon Québec

Unknown's avatarAbout Andrew
Andrew blogs and tweets public policy issues, particularly the relationship between the political and bureaucratic levels, citizenship and multiculturalism. His latest book, Policy Arrogance or Innocent Bias, recounts his experience as a senior public servant in this area.

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